mardi 13 novembre 2007

Très mauvaise diplomatie pour M. Harper - Loïc Tassé

RDI - Le Téléjournal, lundi, 29 octobre 2007



RETRANSCRIPTION AUDIO - TOUT SUR LA CHINE


Daniel L'Heureux : Après George Bush, la semaine dernière, c’est au tour de Stephen Harper de recevoir le Dalaï-Lama. Une rencontre qui est loin de plaire au gouvernement chinois. Pourquoi pensez-vous que Stephen Harper tient à rencontrer le Dalaï-Lama aujourd’hui?


Loïc Tassé : Je vais vous paraître un peu cynique. Le Dalaï-Lama est un homme très populaire. Il a une belle image internationale. Et je pense que M. Harper avait bien besoin d’un peu de popularité et donc il espère que la popularité du Dalaï-Lama va déteindre un peu sur la sienne pour des élections qui vont venir bientôt.

Mais est-ce que l’on peut penser que de la part de M. Harper, il y a une forme d’appui politique pour la cause défendue par le Dalaï-Lama?

J’espère que non. En général, on dit que le Dalaï-Lama veut séparer le Tibet de la Chine. Lui dit que non. Il veut faire une région autonome indépendante pour le Tibet. Mais derrière tout ça, malheureusement, le Dalaï-Lama veut installer une théocratie, un gouvernement de chefs religieux non-élus. Exactement le même type de régime que l’on a chassé en Afghanistan. Donc, quand une démocratie appuie une théocratie, c’est un peu particulier. Il ne me semble pas que cela soit la meilleure chose à faire.

J’imagine qu’on ne peut pas comparer la situation en Afghanistan d’une éventuelle théocratie tibétaine.

Ce ne sont pas des gens sanguinaires. Ce sont des gens non-élus. Le Dalaï-Lama ne veut absolument pas instaurer une démocratie. Il veut un gouvernement où les dirigeants seraient les chefs religieux dont lui-même. On peut avoir des relations avec ce genre de régime, mais sans le promouvoir.

Mais le Dalaï-Lama reste un grand défenseur des droits humains…

C’est un grand pacifiste, c’est un homme aux grandes qualités. Mais, politiquement, il y a là un message qui est pour le moins ambigu, surtout quand on fait la chasse des Talibans, quand on est un peu contre les régimes en Iran ou en Arabie Saoudite.

Il n’y a aucun gouvernement qui va reconnaître le Tibet. On est dans le domaine du symbolique. Et c’est de la très mauvaise diplomatie pour M. Harper. En recevant le Dalaï-Lama tout de suite après M. Bush, il donne l’impression qu’il marche dans les traces de M. Bush. Or, le Canada donne l’impression de se rapprocher des Etats-Unis, alors qu’il a développé pendant cinquante ans une réputation internationale d’arbitre. Et il y perd aujourd’hui.

Symbolique, mais sur le plan économique?

En Chine, le gouvernement contrôle une grande partie de l’économique chinoise. Il est derrière les holdings d’État… ça va rendre un peu plus difficile la vie pour les hommes d’affaire canadiens. Dans la mesure qu’il y a en Asie et particulièrement en Chine, une économie extraordinaire, on veut tous y participer, ça rend un peu plus compliquée la concurrence.

Pourquoi la venue du Dalaï Lama retient autant l’attention dans le contexte actuel. Paul Martin, Jean Chrétien l’avaient déjà reçu?

Mais pas en tant que Premier ministre. Et ils ne l’ont pas reçu en tant que chefs d’État. C’est la grande différence. M. Harper le reçoit en tant que chef d’État du Canada.

Loïc Tassé


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