Le rejet, mercredi 6 février, par le conseil d'administration de Rio Tinto de l'offre publique d'achat (OPA) réévaluée de son rival BHP Billiton alimente les spéculations quant aux projets de Chinalco. Le géant public chinois de l'aluminium a surpris tout le monde en prenant, le 1er février, aux côtés de l'américain Alcoa, 12 % de la branche de Rio Tinto cotée à Londres (soit 9 % du groupe anglo-australien).
Chinalco a mis sur la table 12,8 milliards de dollars (8,75 milliards d'euros) sur les 14 nécessaires à cette acquisition, soit le montant le plus élevé jamais déboursé par une entreprise chinoise pour telle opération à l'étranger. Pékin n'a jamais caché son inquiétude face à une fusion possible des deux géants anglo-australiens, qui renforcerait leur position dominante à un moment où les fournisseurs de minerai de fer cherchent à faire passer des augmentations de tarifs conséquentes auprès des sidérurgistes chinois.
AMBITIONS MONDIALES
Si aucune décision n'est attendue à un moment où la Chine fête le nouvel an, Chinalco se trouve désormais en position de négocier après le revers essuyé par BHP Billiton dont le président, Marius Kloppers, avait mercredi minimisé les conséquences de l'entrée de Chinalco au capital de Rio Tinto. Il estimait qu'elle était " juste un élément parmi d'autres ".
Le géant chinois de l'aluminium a été clairement désigné par Pékin pour devenir un groupe minier diversifié aux ambitions mondiales. En 2007, Chinalco, qui a annoncé un chiffre d'affaires de 131,7 milliards de yuans (13 milliards d'euros), a acheté plusieurs sociétés en Chine, dont un groupe public spécialisé dans les alliages pour l'industrie de la défense. Il a aussi constitué un pôle cuivre de première importance, avec l'acquisition de Yunan Copper par Chalco, sa filiale cotée en Bourse. Enfin, à l'étranger, il a acquis 91 % du canadien Peru Copper Inc., qui détient les droits de la mine péruvienne de Toromocho.
Il n'y aurait rien d'étonnant à ce que le groupe chinois augmente encore sa participation dans Rio Tinto, même si peu d'observateurs croient à une prise de contrôle majoritaire. En tout cas, les Chinois multiplient les contacts avec les autorités australiennes. Chinalco a pris l'initiative de contacter le Foreign Investment Review Board australien - qui doit statuer pour toute acquisition de plus de 15 % d'une société australienne. Mardi, le ministre des affaires étrangères chinois, Yang Jiechi, a rencontré le nouveau premier ministre australien, Kevin Rudd, sinophone, et perçu comme favorable à Pékin. Bon diplomate, M. Yang a alors déclaré que la décision de Chinalco et d'Alcoa d'investir dans Rio Tinto était " une décision indépendante, faite par deux sociétés, une chinoise et une américaine ". Personne ne l'a cru.
Brice Pedroletti
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PHOTO : Gilles Sabrié
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