L'échec est patent et, cette fois, c'est la Chine elle-même qui le proclame : les représentants du Parti communiste chinois (PCC) qui ont tenu, la semaine dernière à Pékin, une nouvelle série de discussions sur le Tibet avec des envoyés du dalaï-lama ont déclaré, lundi 10 novembre, que cette rencontre a " échoué ".
Cette troisième rencontre en un an avec les émissaires du chef spirituel du bouddhisme tibétain avait, certes, peu de chances d'aboutir à une quelconque avancée tant les positions des deux parties semblent irréconciliables. Mais jusqu'à présent, c'était les Tibétains, la dernière fois en la personne de leur négociateur en chef, Lodi Gyari, qui dénonçaient l'impasse où mènent ces discussions. Lundi, c'est le département du " Front uni ", chargé de l'organisation des rencontres entre le Parti communiste et les envoyés du gouvernement tibétain en exil, qui a convoqué une conférence de presse pour annoncer haut et fort l'" échec " de la rencontre, rejetant l'entière responsabilité " du manque de progrès " sur les envoyés du dalaï-lama.
Le vice-ministre Zhu Weiqun (PHOTO) a expliqué : " Durant nos discussions - avec les Tibétains - , nous avons souligné que l'unification de la mère patrie, l'intégrité territoriale et la dignité nationale représentent les intérêts les plus élevés du peuple chinois. " Pour M. Zhu, la façon dont les émissaires tibétains ont formulé leurs demandes témoigne de la volonté " séparatiste " de la " clique " du dalaï-lama. Les négociateurs tibétains ont réitéré leur souhait de voir s'établir au Tibet une " autonomie réelle " pour les " zones de peuplement tibétain ". Pour le vice-ministre chinois, cette formulation " obscure " revient à réclamer une " indépendance partielle ", elle n'est qu'une " indépendance sous une forme déguisée ".
Les Tibétains de Dharamsala, base indienne du " gouvernement en exil " du dalaï-lama, estiment que toute négociation sur l'avenir du Tibet au sein de la République populaire de Chine doit prendre en compte l'ensemble des zones tibétaines. C'est-à-dire aussi bien la " Région autonome du Tibet " que les districts tibétains situés dans les provinces voisines du Qinghai, du Sichuan, du Ganzu et du Yunnan. Une exigence violemment rejetée par Pékin qui s'alarme de ces velléités de recréation d'un " grand Tibet pré-révolutionnaire ".
Le constat d'échec de ces discussions, dont la première série, cette année, s'était tenue après les violentes émeutes de Lhassa au printemps, intervient peu après une déclaration au cours de laquelle le dalaï-lama a fait part de son découragement. " Ma confiance dans l'actuel gouvernement chinois se réduit de plus en plus, avait-il déclaré fin octobre. Jusqu'à présent, nous avons choisi un chemin qui n'a eu aucun effet sur notre objectif principal, qui est d'améliorer la vie des Tibétains au Tibet. Maintenant, il n'y a plus de raison de suivre le même chemin sous prétexte que c'est celui que nous avons suivi... "
A Dharamsala, dans la semaine du 17 au 24 novembre, 300 délégués tibétains venus du monde entier vont plancher sur la nouvelle stratégie à suivre. Le principe cardinal de la non-violence ne sera pas remis en question, affirme l'entourage du dalaï-lama. Mais les plus radicaux parlent déjà de renoncer aux demandes d'autonomie pour revenir à l'exigence antérieure : l'indépendance.
Bruno Philip
Photo - AP Photo/Ng Han Guan
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