Le rachat d'Anheuser-Busch par Inbev a posé peu de problèmes de concurrence, les deux groupes étant géographiquement très complémentaires. Aucun pays n'a imposé de cessions d'actifs au brasseur belgo-brésilien, à l'exception des Etats-Unis qui ont exigé la vente de la (petite) filiale locale de Labatt. Mais tout ne s'est cependant pas passé partout sans heurts.
En Chine, futur premier marché mondial de la bière, Inbev s'est vu imposer par le ministère du commerce chinois des conditions surprenantes et très restrictives pour sa croissance future dans ce pays. Le brasseur ne pourra pas augmenter sa participation de 28,56 % dans le capital du brasseur de la ville de Canton Zhujiang, ni celle de 27 % détenue par AB dans le numéro deux du marché chinois, Tsingtao.
AB Inbev ne pourra pas non plus acquérir des parts dans le capital des deux autres principaux brasseurs chinois Snow et Yanjing. Bref, les autorités chinoises de la concurrence ont cadenassé complètement les positions du brasseur belgo-brésilien, lui interdisant de toucher aux quatre champions nationaux de la bière que sont Zhujiang, Tsingtao, Snow et Yanjing.
Ensemble, AB et Inbev ne détiennent pourtant que 13 % (hors participations minoritaires dans Zhujiang et Tsingtao) d'un marché chinois encore très fragmenté. Le nouveau groupe fusionné est au coude à coude avec Tsingtao pour la deuxième place, derrière Snow, leader du marché avec 17,8 %. Ce jugement fait craindre aux investisseurs étrangers que la Chine ne se serve de sa nouvelle législation anti-monopole comme d'une arme protectionniste.
Les conditions très sévères imposées à Inbev ne constituent cependant pas forcément un handicap supplémentaire pour sa croissance en Chine. « Cette décision ne fait que confirmer un état de fait, explique un analyste. Les quatre champions nationaux de la bière sont tous aux mains des autorités chinoises (NDLR : municipalité de Canton, de Tsingtao, de Pékin et ministère du commerce) et leur prise de contrôle ne peut de toute façon se faire que dans le cadre d'une négociation avec celles-ci. Ce que fait l'Etat chinois aujourd'hui, c'est faire monter la pression en vue de ces futures négociations. On peut aussi penser qu'il manifeste ouvertement sa mauvaise humeur à l'encontre d'un groupe qui n'entretient pas de très bonnes relations avec lui ».
En attendant ce bras de fer, l'Etat chinois continue à renforcer ses propres champions. Tsingtao a ainsi acquis récemment 39 % du capital de la brasserie d'Asahi dans la province de Shandong. Province où Tsingtao est ultra-dominant avec plus de 50 % de parts de marché. Pas de remarques des autorités de la concurrence. Deux poids, deux mesures ?
© Rossel & Cie S.A. - LE SOIR Bruxelles, 2008
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