Le parquet militaire russe a annoncé, mercredi 25 février, la saisie d'un lot de missiles anti-sous-marins et de bombes de contrebande destiné à la Chine. " Une enquête pénale est en cours contre des responsables de la marine et des hommes d'affaires soupçonnés d'avoir acheminé en contrebande 30 missiles anti-sous-marins et 200 bombes d'aviation au Tadjikistan en vue de leur vente en Chine ", a indiqué le procureur militaire, Sergueï Fridinski.
Le lot, d'une valeur de 18 millions de dollars (14,5 millions d'euros), a été saisi au Tadjikistan, une république de l'Asie centrale ex-soviétique, voisine de l'Afghanistan et de la Chine. Les frontières poreuses de cet Etat, l'un des plus pauvres de l'Asie centrale, voient passer de nombreuses cargaisons de contrebande. La saisie d'un chargement d'armes est une première.
Selon une source proche de l'enquête, citée par l'agence Interfax, " la complicité de hauts gradés de la marine, notamment des vice et contre-amiraux est envisagée ". L'identité des responsables de cette opération et celle des destinataires n'ont pas été révélées. Pékin est l'un des trois principaux clients de la Russie pour les ventes d'armes.
" PLAN CONTRE LA CORRUPTION "
En 2006, une affaire de contrebande massive au sein de la douane, rattachée aux services de sécurité, avait conduit à l'éviction de plusieurs généraux par Vladimir Poutine, alors président. Aucun des responsables n'avait été jugé et, six mois après l'annonce de leur éviction, la plupart des généraux cités étaient encore en fonction.
Dans cette dernière affaire, l'enquête révèle que les missiles et les bombes avaient été déclarés obsolètes et devaient être démantelés. Des crédits avaient été affectés par l'Etat pour la liquidation du stock.
L'annonce de cette saisie a été faite mercredi lors d'une réunion du parquet russe. Exceptionnellement, le président Dmitri Medvedev y assistait. Il a exhorté les procureurs à mettre toutes leurs forces au service du " plan national contre la corruption ". Juriste de formation, le numéro un russe a lancé en 2008 un plan de lutte contre la corruption, " une maladie grave qui ronge l'économie et affecte toute la société ". Mais la série de lois préparée par le Kremlin n'a toujours pas été adoptée par le Parlement.
Présente à tous les niveaux de la société, la corruption a atteint des niveaux vertigineux en Russie, ces dernières années. En 2008, l'ONG Transparency International a placé la Russie à la 147e place - sur 180 pays -, à égalité avec le Bangladesh et le Kenya, soit une chute de quatre places par rapport au classement 2007.
" La corruption est implantée depuis longtemps en Russie, il s'agit d'un marché très lucratif de près de 300 milliards de dollars. Ses représentants savent défendre leurs intérêts ", a expliqué, mercredi, Kirill Kabanov, président du Comité national anticorruption, une structure indépendante, lors d'une émission de radio.
Selon le député communiste Viktor Ilioukhine, les lois anticorruption élaborées par le Kremlin sont insuffisantes : " Les organes du maintien de l'ordre, les tribunaux sont corrompus. Et les cadres qui sont au pouvoir ont été mis en place il y a dix ans, au moment où la corruption a commencé à prendre de l'ampleur. Sans une révolution des cadres, rien ne changera. "
Marie Jégo
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