lundi 9 février 2009

La Chine tente de redorer son blason en Afrique - Gabriel Grésillon

Les Echos, no. 20359 - International, lundi, 9 février 2009, p. 8

Le président chinois, Hu Jintao, entame, demain, une tournée africaine qui se distingue des précédentes sur un point : cette fois, pas de géant pétrolier au menu. Un changement significatif en termes de communication.

La constance avec laquelle Pékin tisse son réseau de relations en Afrique est révélatrice de l'importance qu'accorde la Chine à ce continent.

Qu'on se le dise : le spectaculaire rapprochement opéré par Pékin vis-à-vis de l'Afrique est désintéressé. Alors que le chef de l'Etat chinois, Hu Jintao, doit entamer, demain, une tournée dans 4 pays du continent noir qui se terminera par une escale saoudienne, les diplomates chinois ont lancé une offensive de charme pour faire taire les mauvaises langues. En martelant un message : ce quatrième voyage de Hu Jintao en Afrique depuis sa prise de fonction, en 2003, sera exempt d'arrière-pensées commerciales ou géostratégiques.

Le programme même de cette tournée africaine semble avoir été conçu à cette fin. Plutôt que de faire escale, comme lors de ses précédents voyages, dans des pays gorgés de ressources pétrolières - on se souvient du très controversé voyage du président chinois au Soudan, en 2007 -, Hu Jintao rendra visite, cette fois, à ses homologues du Mali, du Sénégal, de Tanzanie et de l'île Maurice. Même si le sous-sol tanzanien ne manque pas de promesses pour l'avenir (riche en minerais divers, il est encore assez largement sous-exploité), aucun des trois autres pays ne peut prétendre au statut de fournisseur majeur de matières premières pour l'économie chinoise.

Argumentaire renforcé

L'ambassadeur chinois à Dakar a enfoncé le clou. Devant les journalistes, Lu Shaye a déclaré que « la Chine développe ses relations de coopération avec les pays africains pas seulement à partir des intérêts économiques ». Puis il s'est livré à une démonstration appuyée : « Le Sénégal n'est pas un pays riche en ressources naturelles, même s'il a du minerai de fer et ce n'est pas la Chine qui exploite ce minerai mais les Européens. » Ou encore : « Il y a de l'or ici mais ce ne sont pas les Chinois qui l'exploitent, ce sont les Canadiens. »

Mis en cause par les Occidentaux pour son soutien à des régimes peu recommandables en Afrique et faisant face à l'émergence d'une grogne dans certains pays - de violentes manifestations ont eu lieu en Zambie contre le propriétaire chinois d'une mine -, Pékin renforce son argumentaire. Le ministre chinois du Commerce, Chen Deming, a ainsi listé, pour l'agence Chine nouvelle, toutes les actions entreprises par son pays en faveur du continent noir. Des politiques préférentielles pour les importations en provenance de 31 pays pauvres ont notamment été mises en place, a-t-il plaidé. Et plus de 10.000 scientifiques africains auraient également été formés par des Chinois.

Il n'en reste pas moins que le commerce bilatéral explose (voir graphique). Et que la constance avec laquelle Pékin tisse son réseau de relations en Afrique est en elle-même révélatrice de l'importance qu'accorde la Chine à ce continent. Visible et forcément médiatisée, la visite de Hu Jintao en Afrique a été précédée, en janvier, par celles, plus discrètes, de ses ministres du Commerce et des Affaires étrangères. Total : 11 pays en moins de deux mois. Qui dit mieux ?

GABRIEL GRÉSILLON

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