Mali, Sénégal, Tanzanie, île Maurice : ces pays sont autant de mines à creuser pour la Chine.
L'ARABIE SAOUDITE est un point de passage obligé. Ce pays est le premier fournisseur de pétrole de la Chine (729 000 barils par jour l'an dernier). Et Pékin y multiplie les investissements industriels.
Le groupe Chalco construit une usine géante d'aluminium sur la mer Rouge, d'une valeur de 3 milliards de dollars, qui sera flanquée d'une centrale électrique évaluée à 2 milliards de dollars. C'est le plus gros investissement jamais réalisé par les Chinois dans le pays. En contrepartie, la Saudi Aramco développe un projet pétrochimique de 5,2 milliards de dollars dans la province du Fujian avec le chinois Sinopec et l'américain Exxon Mobil.
Mais que vient donc faire le président Hu Jintao au Mali, au Sénégal, en Tanzanie et à l'île Maurice ? De l'assistance gratuite pour les aider à lutter contre la crise, comme le dit le gouvernement chinois ?
« Notre relation avec les pays africains n'est pas seulement basée sur l'énergie ou les ressources », affirme le ministre adjoint des Affaires étrangères, Zhai Jun. Le croire, ce serait oublier que la Chine ne néglige jamais les affaires et l'argent.
Pétrole de Casamance, or du Mali
Le Sénégal n'est certes pas un acteur majeur du continent. Mais il a des mines de fer, de phosphate et d'or, exploitées principalement par les Indiens et les Australiens. La Chine ne s'y attaque pas. Mais, diplomate, elle tisse sa toile. Le groupe métallurgique MCC, qui va construire une centrale électrique dans le pays, vante sa technologie dans l'exploitation du fer et de l'or.
Spécialiste chinois des travaux publics, le groupe Henan compte à son actif plus d'une vingtaine d'ouvrages, ponts, routes et adduction d'eau. Il est désormais chargé de la transformation de la ville sainte de Touba. Huawei a la haute main sur le marché des télécommunications fixes et mobiles.
La Chine, surtout, lorgne le pétrole de la Casamance. Les réserves du Sénégal, estimées à un milliard de barils, étaient jugées jusqu'à présent non rentables à cause de leur coût d'exploitation élevé. Aujourd'hui, la donne pourrait changer.
C'est bien l'or, en revanche, qui fait courir Hu Jintao au Mali. Ce pays en est le troisième producteur africain, derrière l'Afrique du Sud et le Ghana. Les mines sont aux mains des Sud-Africains et des Canadiens, mais le gouvernement restreint les permis pour des raisons d'environnement et de déplacement de population. Pékin en profite pour se faire bien voir.
Les Chinois financent un vaste complexe sucrier au sud du territoire et mettent en place des entreprises permettant de transformer le coton malien, deuxième richesse du pays, en produits de prêt-à-porter exportables en dollars. Leur présence reste toutefois diversement appréciée. Ils sont accusés de dévaster les forêts pour récupérer le bois d'ébène qu'ils envoient par camions entiers à Dakar.
De la forêt à la terre, il n'y a d'ailleurs qu'un pas. En Tanzanie, le groupe Chongqing Seed a acquis l'an denier 300 hectares de terres pour cultiver du riz. Un investissement de 143 millions de dollars qui va lui permettre dès cette année d'importer la majorité de sa production pour répondre à la décision de Pékin de diversifier ses sources d'approvisionnement et de faire face à la hausse des prix des denrées alimentaires. La Chine a prévu de créer une quinzaine de zones du même type sur le continent africain.
Zone économique spéciale sur l'île Maurice
Mais c'est sans aucun doute à l'île Maurice que les Chinois surprennent le plus. Dans cette île perdue de l'océan Indien, à 2 300 kilomètres de la côte orientale de l'Afrique, le groupe Tianli va investir 500 millions de dollars pour construire un gigantesque complexe industriel qui accueillera une quarantaine d'entreprises chinoises, abritera plusieurs hôtels luxueux, des villas, des centres de conférence... Le projet intrigue les Mauriciens qui parlent du « mystère Tianli ».
Pékin, cependant, sait ce qu'il fait. Hu Jintao a décidé de lancer trois zones économiques spéciales en Afrique. L'une sera en Zambie pour les métaux que recèle le pays, cuivre, diamants, uranium. Elle assurera un accès facile aux matières premières. L'autre, probablement à Dar es-Salaam, en Tanzanie, deviendra, grâce à son port, une plate-forme d'éclatement des transports dans la région. La troisième, à l'île Maurice, doit devenir un centre entièrement dédié au commerce, sorte de pont entre l'Asie et l'Afrique, chargé de faciliter la circulation des investissements chinois. Trois projets très éloignés des simples préoccupations humanitaires.
Rodier, Arnaud
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