lundi 25 mai 2009

CINÉMA - Nuits d'ivresse printanière par Lou Ye

Mise à jour : Palmarès Cannes 2009

Prix du scénario. Nuits d'ivresse printanière, de Lou Ye (Chine)

Voici une revue de presse des différentes critiques du film de Lou Ye présenté à Cannes. Extraits :



La Croix, no. 38359 - Culture, vendredi, 15 mai 2009

Liberté entravée et fuite en avant

"En dépit de son titre poétique, marginalité et solitude, violence du sentiment et fuite en avant hantent aussi le film de Lou Ye. [...] Plutôt littéraire dans son approche, cherchant à capter l'intériorité des protagonistes, le cinéaste admet avoir fait référence au Jules et Jim de François Truffaut, quitte à inverser les termes de la relation triangulaire que le film évoquait. [...]"

Le Figaro, no. 20152 - Le Figaro et vous, vendredi, 15 mai 2009, p. 28

Pathétique banlieusard - Eric Neuhoff

"De ce backstreet sauce nuoc-mâm, Poiret et Serrault auraient tiré une comédie virevoltante. Ça n'est pas le genre de la maison. Toute velléité d'humour a été soigneusement écartée de ce mélodrame où une crevaison sur l'autoroute représente le seul événement marquant. Sinon, on se papouille dans une cabane. On s'étreint sous la douche. Il arrive même que la chose se déroule dans un lit. Saisis par une caméra qui donne le mal de mer, des couples se défont, dans une bouillie où se distinguent des scènes conjugales, des chansons dans une boîte de travestis, des errances urbaines. Il convient d'ajouter à ce joyeux arsenal un suicide aux lames de rasoir, parce que cela manquerait au tableau. Il semblerait que Lou Ye ait eu quelques problèmes en Chine. Apparemment, ça n'est pas demain la veille que son film risque d'être projeté là-bas. À Cannes, nous n'avons pas eu cette chance."

Libération, no. 8714 - Cannes, vendredi, 15 mai 2009, p. 25

Nuits de Chine, nuits fébriles - Olivier Séguret

"A sa façon ultra contemporaine, Lou Ye semble vouloir renouer avec des fragments de cette nuit immense mais constellée d'étoiles que forme le continent homosexuel chinois. Chacun des chapitres du film débute par les très beaux extraits, calligraphiés sur l'écran, d'un roman de Yu Dafu, écrivain des années 20. [...] Une caméra superbe, une bande-son tout en reliefs et concrétudes, des acteurs profondément à leur ouvrage. Une certaine confusion alourdit parfois le mitan de Nuits d'ivresse... Mais on le comprend surtout par contraste : la dernière demi-heure, d'une élégance glacée, venant prouver de quelles hauteurs superbes est capable le hardi Lou Ye."

Le Soir - 1E - CULTURE, vendredi, 15 mai 2009, p. 27

« Nuits d'ivresse printanière », de Lou Ye, c'est « Jules et Jim » inversé

"Dans le monde des sentiments, les choses sont moins évidentes. Lou Ye le traduit avec délicatesse, sensualité, poésie, mélancolie à travers une folle équipée amoureuse de deux garçons et une fille. Il filme sans effets. C'est naturel, banal et du coup bouleversant. Histoire d'amour et de désir glissant jusqu'aux confins de la jalousie et de l'obsession amoureuse, son film est une provocation pour une Chine qui nie ses pulsions secrètes et préfère le collectif à l'individu."

Le Temps - Culture, vendredi, 15 mai 2009

Morne printemps chinois - Thierry Jobin

"La caméra de Lou Ye balaie frénétiquement l'intrigue, façon essuie-glace, pour faire vrai [...]. Le cinéaste enfreint évidemment tous les tabous et brave la censure chinoise. Il sera d'ailleurs sans aucun doute interdit une nouvelle fois dans son pays, mais cette nouvelle sélection cannoise lui permettra au moins d'avoir gagné une audience internationale, la complaisance de la presse parisienne la plus branchée, voire une distribution dans quelques pays. [...] Il fait ce qu'on attend de lui, c'est-à-dire extasier l'Occidental qui s'exclamera: «Quel courage de tourner un tel film en Chine!». Le problème, c'est que Nuits d'ivresse printanière ne repose que sur ce seul enjeu. S'il était français ou américain, ses transgressions n'exciteraient personne: sur le fond comme sur la forme, il n'innove en rien. [...] Il oublie, outre l'homosexualité décrite comme une maladie transmissible, d'honorer - sans jeu de mots là encore - la moindre problématique."

Le Monde - Culture, vendredi, 15 mai 2009, p. 14

Un film brûlant sur l'homosexualité en Chine, une fresque décevante - Jean-Luc Douin

"Malgré des prouesses formelles et des étreintes fiévreuses, le long métrage de Lou Ye, cinéaste interdit dans son pays, n'émeut pas. [...] Le cinéaste utilise toutes sortes de musiques d'une manière que l'on qualifiera de maladroite ou de racoleuse, selon. Il est d'évidence fasciné par le Happy Together de Wong Kar-waï, mais force est de constater que ses prouesses formelles ne servent qu'à orchestrer un ballet de téléphones portables et une tournée des lieux chauds. Placé sous les auspices du romancier des années 1920 Yu Dafu, le film affronte la peinture des relations sexuelles entre hommes, aligne des cris de jouissance et des crises de sanglots, sans jamais parvenir à nous émouvoir sur ce que vivent les personnages. La peinture d'une Chine où la police traque les travailleurs clandestins et où tout s'arrange à coups d'argent et de relations reste à l'arrière-plan d'une ténébreuse image digitale."

Rue89 - 15 mai 2009

Lou Ye, Campion et Guédiguian : des films d'amour et d'audace - Olivier de Bruyn

"La liberté de l'esprit et la liberté tout court passent par la liberté du corps. Fort de cette belle et ambitieuse idée du cinéma, Lou Ye, caméra à l'épaule, suit les dérives de ses protagonistes et maintient le reste (contexte moral et social de la Chine contemporaine) dans une discrète toile de fond. Hélas, si l'audace du cinéaste entraîne -c'est bien le moins que l'on puisse dire- un respect de principe, le film s'abîme dans la répétition et une certaine préciosité formelle… A force de jouer la carte de l'accumulation et de laisser hors-champ le tumulte du monde, Lou Ye tourne dangereusement en rond et son film avec lui. Du coup, problème, on en vient à se demander si « Nuits d'ivresse printanière », situé ailleurs qu'en Chine, présenterait un réel intérêt… Mais voilà : le film se passe là-bas, ici et maintenant. Et du coup, les réticences (euphémisme) ne pèsent pas forcément très lourd face au courage d'un metteur en scène bien décidé, à ses risques et périls, à bousculer les tabous. Ce à quoi sert aussi le cinéma."


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