Au terme d'un procès qualifié de " politique " par l'accusé, l'ancien président taïwanais Chen Shui-bian a été condamné, vendredi 11 septembre, à la prison à vie et à une amende de 6 millions de dollars (4,1 millions d'euros). L'ancien chef de l'Etat, au pouvoir durant deux mandats entre 2000 et 2008, était en détention provisoire depuis novembre 2008 après avoir été mis en examen pour corruption, blanchiment d'argent, détournement de fonds et falsifications de documents.
Agé de 58 ans, M. Chen était accusé d'avoir détourné plus de 3 milliards de dollars (2 milliards d'euros) de fonds publics et d'avoir accepté l'équivalent de 12 millions de dollars (8,2 millions d'euros) de pots-de-vin dans le cadre d'une transaction immobilière. Son épouse, Wu Shu-chen, inculpée dans la même affaire, a été aussi condamnée à perpétuité. Le fils de M. Chen et sa belle fille, devront, de leur côté, purger des peines de 20 et 30 mois de prison pour avoir trempé dans ce qui pourrait avoir été une entreprise de malversation en famille...
M. Chen était arrivé menotté à l'ouverture du procès, jeudi, mais n'était pas présent quand le verdict du tribunal de Taïpeh a été rendu. L'un de ses gardiens a raconté à la presse que le détenu avait réagi sans émotion apparente à la nouvelle de sa condamnation.
L'ex-chef de l'Etat clame son innocence depuis le début. Il accuse l'actuel pouvoir du président Ma Ying-jeou, élu au printemps 2008, de " persécution " politique. Durant son double mandat, Chen Shui-bian était devenu le chantre des partisans de l'affirmation d'une identité taïwanaise dont les plus radicaux souhaiteraient que l'île rebelle se déclare formellement indépendante de la Chine, un casus belli pour Pékin.
L'actuel président Ma, au contraire, est en faveur du statu quo qui permet à Taïwan de jouir de sa souveraineté tout en reconnaissant le principe d'une Chine unique, comme l'exige la Chine populaire. Depuis l'élection de Ma Ying-jeou, les relations sino-taïwanaises, au plus bas durant la présidence de Chen Shui-bian, se sont d'ailleurs spectaculairement réchauffées.
Le verdict de vendredi a fait la une de la presse chinoise de samedi. Sans surprise, Pékin se réjouit de la mise à l'écart de sa bête noire. La " une " du quotidien anglophone China Daily montre M. Chen derrière les barreaux, le regard triste et lointain. L'article souligne que, si la formation de l'ancien président, le Parti démocratique progressiste (DPP), met ses menaces de protestation de masse à exécution, cela pourrait être fatal au DPP. " La plupart des Taïwanais ne sympathisent pas avec Chen maintenant que les accusations contre lui sont devenues évidentes ", explique Wang Hailiang un expert shanghaïen des affaires taïwanaises cité par le China Daily.
Chen Shui-bian a pour sa part décidé de faire appel du jugement.
Bruno Philip
PHOTO - Chen Shui-bian au centre de détention de Taipeh, le 11 septembre 2009 / Getty Images
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