mercredi 7 octobre 2009

Kim Jong-il exige des négociations directes avec Washington - Sébastien Falletti

Le Figaro, mercredi, 7 octobre 2009, p. 8

LA BALLE est de nouveau dans le camp américain au lendemain de la visite du premier ministre chinois Wen Jiabao à Pyongyang. Et le dilemme nucléaire nord-coréen de Barack Obama reste entier. La Maison-Blanche attendait beaucoup de la visite en grande pompe du numéro deux chinois, officiellement venu célébrer 60 ans de fraternité communiste. Elle espérait que Kim Jong-il annoncerait son retour à la table des pourparlers à six sur le nucléaire sous la pression du grand frère venu de Pékin.

Trois jours plus tard, l'objectif n'est qu'à moitié rempli : le dictateur a bien laissé entendre qu'il pourrait revenir aux négociations multilatérales qu'il avait quittées « définitivement » en avril, mais il a fixé ses conditions. Au préalable, il exige l'ouverture de discussions directes avec Washington.

« Nous sommes prêts à revenir au cadre multilatéral en fonction du résultat des discussions avec les États-Unis », a expliqué à Wen le dictateur. Un thème martelé par le Rodong Shimbun, le journal de la propagande, qui a souligné dans un éditorial que les États-Unis détenaient la clé du dossier nucléaire envasé depuis des mois. Une façon d'accroître la pression sur Barack Obama tout en maintenant à distance l'allié chinois.

Les appétits de Pékin

Tout avait pourtant bien commencé dimanche sur le tarmac de l'aéroport de Pyongyang où Kim Jong-il en personne est venu embrasser le premier ministre chinois. Un honneur réservé aux chefs d'État qui témoigne de la volonté du dictateur de resserrer les liens avec son voisin et protecteur après l'avoir ulcéré en conduisant un second test nucléaire en mai.

Alors que les sanctions économiques et l'isolement diplomatique s'accroissent, le royaume ermite est plus que jamais dépendant de l'aide de la Chine, qui absorbe 70 % de son commerce. Les échanges entre les deux pays ont presque doublé depuis 2005 au grand bénéfice des hommes d'affaires chinois qui lorgnent sur les ressources minières mais aussi l'ouverture sur le Pacifique qu'offre la Corée du Nord. La présence du ministre du Commerce au sein de la délégation de Wen confirme les appétits de Pékin qui a affirmé sa volonté de renforcer les liens avec le Nord dans « tous les domaines ».

Mais malgré une marge de manoeuvre étroite, Kim Jong-il réussit à marquer un pas de plus en direction de son objectif ultime : un marchandage nucléaire en tête à tête avec les États-Unis. Car désormais Barack Obama devra faire un geste s'il veut faire avancer le dossier de la dénucléarisation qui est une des priorités internationales de son mandat. Quitte à offrir sur un plateau une victoire politique au régime en envoyant un émissaire à Pyongyang. Sans garantie de résultat.

Au sein de l'Administration démocrate, le débat fait rage : certains conseillers estiment qu'il est trop tôt pour parler et soulignent que les sanctions portent leurs fruits. D'autres affirment qu'il est temps de tester la volonté du dictateur de renoncer à l'arme nucléaire, en entrouvrant la porte du dialogue. Barack Obama devra bientôt trancher.SÉO

« Nous sommes prêts à revenir au cadre multilatéral en fonction du résultat des discussions avec les États-Unis »

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