vendredi 23 octobre 2009

OPINION - Le défi chinois - Jacques Hubert-Rodier

Les Echos, no. 20537 - Idées, vendredi, 23 octobre 2009, p. 16

La planète entière devrait s'en féliciter. La Chine a confirmé hier l'accélération de sa croissance. Le PIB chinois a bondi de 8,9 %, sur un an, au troisième trimestre. Ce qui permet à Pékin de réaffirmer son objectif de parvenir cette année à une croissance de 8 %. Avec les premiers signes de reprise aux Etats-Unis et en Europe, on pourrait avoir l'impression que le monde a tourné le dos à la pire récession qu'il a connue depuis la Grande Dépression des années 1930. Loin s'en faut pourtant.

Tout d'abord, le spectaculaire rebond de la production chinoise est dû presque exclusivement à l'énorme plan de stimulation décidé par Pékin pour empêcher la République populaire de sombrer à son tour dans la catastrophe. Ce plan est essentiellement à vocation intérieure. Les quelque 400 milliards d'euros de dépenses du gouvernement ont permis de lancer une politique de grands travaux avec la construction de routes et de centrales électriques, et de compenser partiellement la baisse des exportations chinoises. Mais ils n'ont que très faiblement contribué à la correction des déséquilibres économiques entre la Chine et le reste du monde. Américains et Européens continuent de redouter une invasion de produits chinois, toujours possible tant que le yuan est sous-évalué.

Il ne faut pas perdre de vue non plus que la Chine ne pourra, à elle seule, tirer l'économie mondiale de sa langueur. Elle est certes la troisième économie mondiale. Mais, à parité de pouvoir d'achat, elle ne représente encore que le tiers de l'économie américaine et, quand on ramène sa richesse produite au nombre d'habitants, elle ne représente que le quatorzième.

Comme l'Europe et l'Amérique, la Chine peut cependant faire plus. Sa première responsabilité est d'encourager la consommation intérieure et de se doter d'une protection sociale qui la rapprocherait des critères européens. L'autre impératif est d'empêcher tout risque d'apparition de bulles financière ou immobilière que pourraient encourager les mesures de stimulation.

Car le véritable risque est l'excès d'optimisme. De voir une Chine, sûre d'avoir retrouvé le chemin de la reprise, renouer avec ses mauvaises habitudes d'avant la crise. Son histoire lui a montré les dangers de la précipitation. Elle sait que le « Grand Bond en avant » des années 1960 du président Mao s'est terminé par une catastrophe. Or, le monde a besoin d'elle.

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