Il y a, ces temps-ci, des bancs de brouillard sacrément épais en mer. Parmi les nombreuses vigies qui scrutent la conjoncture de la marine marchande pour lui éviter les récifs financiers et les vents mauvais des dépôts de bilan, il en existe qui manifestent un bel optimisme, à l'image de Jim Wong, analyste chez Nomura à Hongkong, cité par Bloomberg.
Les 4 507 points atteints vendredi 20 novembre par l'indice Baltic " sec ", qui mesure le prix de l'affrètement d'un mastodonte de plus de 100 000 tonnes pour charrier sur les océans blé, minerai de fer ou charbon, lui semblent de très bon augure.
Pensez ! Un bond de quelque 115 % en quarante jours ne peut annoncer qu'une mer belle et peu agitée. Au-dessus des 4 000 points, tous ces gros galions d'aujourd'hui gagnent de l'argent.
Donc M. Wong est confiant. " Nous confirmons notre prévision haussière dans le secteur du fret sec, affirme-t-il, car nous nous attendons à une augmentation de la demande de transport en vrac, au moment où l'offre de transport s'annonce inférieure aux attentes, en raison des reports de livraisons de nouveaux bateaux ou d'annulations de commandes. "
D'autres marins de haute mer ne partagent pas cet optimisme raisonné. " Cette amélioration est toujours bonne à prendre, maugrée l'un d'eux, mais elle est fragile et temporaire, car elle est uniquement tirée par la reconstitution des stocks dans l'industrie mondiale. Tant que celle-ci ne repartira pas... "
Pourtant, la Chine a sorti son très gros carnet de chèques pour acheter la plus grande quantité de minerai de fer depuis dix ans. Les ports chinois et brésiliens ne sont-ils pas à nouveau embouteillés, comme aux beaux jours de 2007, en raison de cette frénésie d'achats de minerais ?
" Ce phénomène touche à son terme, persévère notre armateur morose, car le consommateur occidental ne consomme toujours pas; il rembourse ses dettes. " Il évalue la surcapacité de la flotte à 15 %.
Comme les compagnies de navigation souffrent d'une insuffisance de fonds propres et que leurs banquiers souffrent toujours d'un sérieux mal de mer d'après-subprimes, les annulations de commandes de bateaux pleuvent. En 2009, il aurait dû arriver dans la flotte 170 nouveaux Capesize, les plus gros des minéraliers. Seulement 35 seraient entrés en service. Et 300 de ces colosses sont en commande dans les chantiers navals pour livraison en 2010. Non, le gros temps n'est pas terminé.
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