mardi 12 janvier 2010

Exportations, automobile : la Chine passe en tête - Brice Pedroletti

Le Monde - Economie, mardi, 12 janvier 2010, p. 13

Premier exportateur mondial, premier marché automobile de la planète, la Chine accumule les médailles d'or. Ses exportations se sont établies à 1 200 milliards de dollars (830 milliards d'euros) en 2009, selon les statistiques publiées le 10 janvier. Elle dépasse désormais l'Allemagne. Et c'est aux Etats-Unis qu'elle a ravi la place de numéro un sur le marché automobile. Les ventes de voitures en Chine ont bondi de 44 % en 2009 pour atteindre le chiffre record de 13,5 millions d'unités (contre un plongeon de 21 % aux Etats-Unis, à 10,4 millions).

Les performances exportatrices de la Chine ont été obtenues en dépit d'une chute de 16 % par rapport à 2008 - une première depuis 1983. Mais l'impact significatif de la chute de la demande mondiale sur l'économie locale a été compensé par l'effort colossal consenti en investissement productif, puisque la contribution à la croissance de ce dernier est estimée à 90 %.

Le pays a aussi vu se réduire de 34 % son excédent commercial en 2009 par rapport à 2008. Celui-ci s'établit à 198 milliards de dollars. Quant aux importations, elles se sont mieux maintenues que les exportations, puisqu'elles n'ont chuté que de 11 % en 2009.

Le poids de la Chine dans les échanges mondiaux est toutefois à relativiser en termes qualitatifs : les produits électroniques et des industries de l'information, dont ce pays est le premier exportateur mondial et qui constituent 37,5 % de ses exportations, sont par exemple en grande partie issus du " commerce de perfectionnement " (processing trade) - les composants qui ont le plus de valeur marchande, en raison de leur contenu technologique ou de marque, sont fabriqués ou conçus ailleurs, seulement assemblés en Chine.

" D'une part, la valeur ajoutée est faible dans la phase d'assemblage dévolue à la Chine et de l'autre, les firmes étrangères assurent 70 % de la production et 85 % des exportations ", argumente dans un livre à paraître aux Presses de Science Po, Chine et Japon d'après-crise. Quel leader pour l'Asie, le spécialiste des économies asiatiques Claude Meyer. Ainsi, la majorité des produits Apple vendus dans le monde sont fabriqués en Chine par Foxconn, société taïwanaise.

Les limitations du modèle chinois sont d'ailleurs souvent critiquées en Chine même : c'est la taille de ses exportations qui permet au pays de surpasser l'Allemagne comme premier exportateur mondial, mais " en termes de structure des exportations, d'innovation technologique et de compétitivité industrielle, la Chine est loin de mériter le titre de puissance commerciale ! ", note Zhao Jinping, chercheur dans un think tank du gouvernement chinois, interrogé par l'Agence Chine nouvelle.

Le mois de décembre 2009 marque le premier rebond des exportations en glissement annuel après treize mois consécutifs de déclin (en comparaison certes de décembre 2008, au plus fort de la crise financière) : les exportations chinoises ont rebondi de 18 %, et les importations de... 56 %.

Essentiellement, pour ces dernières, en raison de livraisons record de minerai de fer et de pétrole. L'appétit dévorant de la Chine pour les matières premières est donc de nouveau d'actualité : les importations de minerai de fer ont bondi de 41,6 % en 2009, et celles de pétrole de 13,9 % sur l'ensemble de l'année 2009. Il s'agit pour les industriels chinois de profiter des tarifs mondiaux encore faibles et de répondre au déluge d'investissements en aéroports, trains à grande vitesse, lignes de métro, nés du plan de relance de 4 trillions de yuans sur deux ans, mis en oeuvre fin 2008.

Pékin, qui tente par ailleurs de freiner la formation d'une bulle spéculative dans l'immobilier, a promis que le rythme des investissements publics en provenance du gouvernement central - ils constituent 50 % du plan de relance - se maintiendra en 2010, selon les déclarations récentes du ministre des finances, Xie Xuren.

Pour l'instant, la perspective d'une croissance soutenue de l'économe locale, pour déséquilibrée qu'elle soit, empêche que nombre des productions chinoises issues des industries en surcapacité (ciment, aluminium, acier, engrais...), dont une partie s'exporte - l'Europe et les Etats-Unis ont par exemple pris des mesures contre le prétendu dumping de tubes et tuyaux chinois pour l'industrie pétrolière -, ne se déversent encore sur les marchés mondiaux.

Elle ne peut toutefois que renforcer la domination de la Chine dans une gamme de plus en plus élargie de produits : forte du premier marché automobile du monde, le pays - la plupart des constructeurs et équipementiers étrangers y sont installés - devient de plus en plus une base pour l'exportation de pièces détachées.

En décembre 2009, Pékin a proposé d'intensifier les efforts pour permettre aux exportateurs chinois d'avoir 10 % du commerce mondial des équipements pour l'industrie automobile d'ici à 2020. Quant au marché automobile local, les avantages fiscaux consentis au cours de l'année 2009 ont été reconduits pour 2010, et les experts tablent déjà sur au moins 15 % de croissance des ventes.

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