mardi 18 mai 2010

En Chine, la pollution domestique ferait 2,2 millions de morts par an

La Croix, no. 38666 - Monde, mardi, 18 mai 2010, p. 11

Un rapport officiel publié hier à Pékin montre que les anciennes et nouvelles habitations concentrent des produits toxiques.

Le développement économique effréné de la Chine depuis trente ans s'est accompagné d'une hausse vertigineuse de la pollution. Un rapport de la Banque mondiale établissait en 2007 que chaque année 750 000 personnes en Chine mourraient prématurément de la pollution de l'air et de l'eau. L'étude montrait que les jeunes enfants étaient une population particulièrement sensible à la nocivité de ces produits. Parmi les 20 villes les plus polluées au monde, 16 étaient chinoises, affirmait à l'époque la Banque mondiale. Ce qui restait inconnu jusqu'à hier, c'étaient les statistiques officielles chinoises, qui révèlent cette fois que 2,2 millions de personnes, pour moitié des enfants de moins de 5 ans, seraient mortellement victimes de la pollution domestique chaque année.

Ainsi, selon l'étude du Centre chinois de prévention et de contrôle des maladies, citée hier par l'agence de presse Chine nouvelle, on trouve dans les appartements chinois des produits comme le formaldéhyde (CH20), l'ammoniaque ou le radon (polluants d'intérieur parmi les plus dangereux) à des niveaux cinq à dix fois supérieurs qu'à l'extérieur. « Le formaldéhyde est classé comme "cancérogène certain" par le Centre international de recherche contre le cancer, explique Caroline Marchand, ingénieur à l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (Ineris). On le retrouve dans les conservateurs et surtout dans tout ce qui est liant, comme les colles. Il est donc très présent dans l'air intérieur. » L'ammoniaque, un puissant irritant des voies respiratoires, est utilisée dans la fabrication de colorants, la fabrication de produits alimentaires ou encore l'industrie des matières plastiques. Le radon, quant à lui, est un gaz radioactif très volatil qui provient du sol, notamment des massifs anciens. « D'une manière générale, plus les matériaux intérieurs sont neufs, plus l'habitation est perméable et plus la concentration en gaz nocif est forte », souligne encore Caroline Marchand.

L'exposition à long terme des habitants à ces substances, qui se diffusent au fil des mois et des années dans l'air domestique, provoque une série de maladies : affections respiratoires, cancers et retard mental. Les enfants, foetus et personnes âgées sont les plus à risques, selon l'étude chinoise.

Si l'on ne sait pas encore très bien par quels mécanismes précis l'exposition est cause de la maladie, on sait que les petites particules et plusieurs autres polluants contenus dans la fumée présente dans les habitations provoquent une inflammation des voies respiratoires et des poumons et altèrent la réponse immunitaire, explique l'OMS. En effet, selon Caroline Marchand : « En Asie, le chauffage se fait encore souvent au charbon. Or, il suffit que les pièces ne soient pas bien séparées et qu'il n'y ait pas une bonne extraction de l'air pour que les gaz stagnent dans la pièce et affectent les voies respiratoires des habitants. » La fumée présente dans une habitation mal ventilée peut contenir 100 fois plus de petites particules que ce qui est considéré comme acceptable pour l'air extérieur, selon un rapport de l'OMS. L'exposition des femmes et des enfants est particulièrement importante car ce sont eux qui passent le plus de temps près du foyer.

Lucie Denechaud

PHOTO - Shoppers cover their noses and mouths near a passing car as they wait to cross a street at Hong Kong's shopping Causeway Bay district July 15, 2009. Urban pollution in Hong Kong has jumped sixfold in the past four years, but experts say local vehicles are more to blame than smog blown in from southern China's manufacturing belts, a newspaper reported on Wednesday.

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