mardi 8 février 2011

L'Inde joue son rôle de moteur de l'économie mondiale

Les Echos, no. 20865 - International, mardi, 8 février 2011, p. 10

La croissance indienne devrait s'établir à 8,6 % pour l'année fiscale 2010-2011, grâce notamment à son secteur informatique. Seule ombre au tableau, la menace d'une hausse des prix à la consommation.

Une croissance de 8,6 % pour l'exercice 2010-2011 (s'achevant le 31 mars) : c'est la nouvelle prévision formulée hier par le gouvernement indien. Une prévision conforme grosso modo à celles des économistes et qui confirme que l'Inde demeure, avec la Chine, l'un des deux moteurs de la croissance mondiale. Sur base de taux de change courants, l'Inde devrait ainsi intégrer les dix premières économies mondiales en termes de produit intérieur brut (PIB).

La bonne performance de l'économie indienne cette année tient une fois de plus à ses activités de services. Tirés par l'informatique et la sous-traitance, les services représentent 56,9 % de l'économie (en 2009-2010) et ne cessent de croître plus vite que l'industrie et l'agriculture. En 2010-2011, une croissance de 11 % est attendue. La deuxième vraie bonne nouvelle de cette année est plus inhabituelle : elle tient à l'excellente tenue de l'agriculture. Grâce à une forte mousson l'été dernier, la production agricole aura crû de 5,4 %, soit un très fort rebond après la quasi-stagnation (+ 0,2 %) de l'an dernier. Même si l'agriculture ne contribue plus à l'économie indienne qu'à hauteur de 14,5 %, ses performances sont essentielles puisque environ les deux tiers de près de 1,2 milliard d'Indiens en dépendent. Une année de bonnes récoltes améliore donc le sort de centaines de millions de personnes et tire la demande de produits de consommation. La seule déception, finalement, vient de l'industrie (28,6 % de l'économie), dont la croissance devrait s'établir à 6,2 %.

Obstacles

Si la performance de l'économie indienne peut faire rêver dans le monde occidental, le tableau n'est pas idéal pour autant. A 8,6 %, l'Inde n'est pas encore revenue aux 9,5 % de croissance enregistrés en moyenne en 2006-2008, avant la crise mondiale. En outre, ce rythme n'est pas garanti. Voici quelques jours, le Premier ministre, Manmohan Singh, a exprimé la crainte que l'inflation actuelle ne pèse sur la croissance. Le consensus des économistes sondés par Reuters prévoit d'ailleurs un léger ralentissement en 2011-2012, à 8,5 %. Enfin, même si de tels taux peuvent paraître élevés, nombre d'économistes estiment que l'Inde doit arriver dans la zone des 10 % de croissance par an, comme l'a fait la Chine, pour résorber substantiellement l'extrême pauvreté et le sous-développement de ses infrastructures. Ce qui supposerait, comme le montre une étude de l'agence de notation Crisil, d'« éliminer les barrières qui entravent l'offre », grâce à « des réformes dans les infrastructures, l'agriculture et l'éducation, et une participation accrue du secteur privé ».

Le secrétaire américain au Commerce, Gary Locke, a ainsi demandé hier à l'Inde d'ouvrir son économie en réduisant les barrières douanières et les taxes pour encourager l'investissement international direct et combattre la pauvreté. Gary Locke, qui se trouve en Inde pour une mission visant à encourager le développement des liens commerciaux entre l'Inde et les Etats-Unis parallèlement au réchauffement des relations politiques, a déclaré qu'il était en pourparlers avec les responsables indiens sur les sujets de friction, tels que le libre accès au marché. L'Inde a connu une importante libéralisation économique au cours des vingt dernières années, mais les compagnies internationales sont toujours exclues de nombreux secteurs potentiellement lucratifs, tels que les supermarchés dans ce pays où le consumérisme est fort.

patrick de jacquelot

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