lundi 4 février 2008

La Banque mondiale presse Pékin de réorganiser ses finances publiques - Yann Rousseau

Les Echos, no. 20102 - International, lundi, 4 février 2008, p. 8
Tournant en boucle sur les télévisions chinoises, les scènes apocalyptiques de maisons écroulées sous la neige, de villages coupés du monde en raison des intempéries et de voyageurs affamés aux portes des gares ont cruellement surpris la population, mais également les autorités de Pékin. Quelques jours après avoir annoncé que sa croissance avait atteint 11,4 % en 2007, la Chine a pris conscience des failles de son spectaculaire développement.

Tournant en boucle sur les télévisions chinoises, les scènes apocalyptiques de maisons écroulées sous la neige, de villages coupés du monde en raison des intempéries et de voyageurs affamés aux portes des gares ont cruellement surpris la population, mais également les autorités de Pékin. Quelques jours après avoir annoncé que sa croissance avait atteint 11,4 % en 2007, la Chine a pris conscience des failles de son spectaculaire développement. Effrayées par l'ampleur de la crise, les autorités ont déployé l'armée dans les zones les plus touchées et promis, ce week-end, de débloquer des aides d'urgence.

Pour mettre à niveau ses régions pauvres, où vivent encore les deux tiers du 1,3 milliard de ses habitants, la Chine a besoin d'une profonde réorganisation de ses finances publiques, explique la Banque mondiale dans un ouvrage publié - hasard du calendrier - ces jours-ci. « Le gouvernement doit repenser ses priorités », résume Shuilin Wang, l'un des auteurs.

Disparités accrues

Espérant dynamiser ses provinces, le gouvernement central a donné, dans les années 1980, une large autonomie fiscale aux autorités locales et leur a délégué le financement d'une partie de leurs infrastructures et des grands programmes sociaux. « Cette décentralisation devait accroître l'efficacité du service public (...), mais l'inéquation entre les revenus et les dépenses des gouvernements locaux a accru les disparités régionales », explique la Banque mondiale. Dans les villages les plus pauvres, les revenus fiscaux sont trop faibles pour assurer les services publics de base.

Reconnaissant ces carences, Pékin a promis, dès 1994, de transférer une plus large part des revenus fiscaux de l'Etat central aux collectivités (25 % de la TVA notamment). Mais ces flux, distribués de manière floue, sont toujours trop faibles pour assurer des services publics efficaces. Au total, le pays ne dépense ainsi plus que 3,1 % de son PIB pour l'éducation et 1,8 % pour sa santé, soit beaucoup moins que d'autres pays à revenus moyens qui dépensent, eux, respectivement 4,6 % et 3,8 % de leur PIB pour ces services, pointe le rapport.

S'il veut vraiment rééquilibrer son développement, Pékin doit, selon les experts de la Banque mondiale, reprendre à l'échelon central ou provincial la responsabilité du financement de certains programmes sociaux, notamment la sécurité sociale et l'éducation. L'Etat doit parallèlement accepter de mieux partager ses revenus avec les plus petits échelons des collectivités, qui pourraient alors assurer un entretien décent de leurs infrastructures. Pour s'assurer les rentrées fiscales nécessaires à cette réorganisation, le pays pourrait, aussi, selon la Banque, augmenter l'impôt sur le revenu ou les taxes sur l'alcool, le tabac et les énergies polluantes.

YANN ROUSSEAU

Note(s) :

DE NOTRE CORRESPONDANT À PÉKIN.

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