samedi 22 mars 2008

VIDÉO TIBET - Éditorial de Alain Duhamel - L'appel à l'aide du Dalaï-Lama

RTL - Le fait politique, jeudi, 20 mars 2008
Le Dalaï Lama appelle à l'aide la communauté internationale pour qu'elle fasse pression sur la Chine, afin que celle-ci suspende la répression au Tibet. A-t-il une chance d'être entendu ?

VERSION ÉCRITE

Le Dalaï Lama est un homme sage, sensible, réfléchi. Il vit évidemment très douloureusement la répression terrible qui pèse en ce moment sur son peuple, avec des dizaines de morts, on saura peut être plus tard d'ailleurs que ce sont des centaines, avec les persécutions qui s'annoncent, les arrestations arbitraires. En même temps, il sait parfaitement que derrière ça, l'objectif de la Chine, c'est tout simplement de mettre fin à l'originalité culturelle et religieuse du Tibet. Il sait que la Chine a mobilisé des moyens absolument gigantesques pour cela. Qu'elle a transformé le Tibet en une véritable colonie de peuplement, où les chinois sont maintenant beaucoup plus nombreux que les Tibétains eux-mêmes. Qu'elle veut en faire une sorte de paradis touristique pour arracher la culture originelle du Tibet. Que les enfants et les adolescents tibétains sont élevés de telle manière, qu'on les empêche de croire à ce que tous leurs ancêtres ont toujours, en tout cas au moins, imaginé.

Alors le Dalaï Lama en appelle à la communauté internationale, il doit le faire sans beaucoup d'illusion, il sait très bien que par exemple, le premier Britannique a eu au moins le courage de parler avec le premier ministre chinois, mais que le premier ministre chinois lui a répondu qu'il s'entretiendrait avec le Dalaï Lama à condition que le Dalaï Lama renonce à la volonté d'indépendance et à la violence. Or le Dalaï Lama ne demande ni l'indépendance, ni la violence. C'est donc la carte qu'utilise le Dalaï Lama, mais c'est une faible carte.

Certains proposent le boycott des Jeux Olympiques. Qu'en pensez-vous ?

Beaucoup de mal. Je trouve que c'est une fausse solution, et surtout que c'est une solution qui en réalité, est une solution de lâcheté. Que ce soit évidemment la question des Jeux Olympiques qui permette aujourd'hui de contester la politique de la Chine en matière de Droits de l'Homme, ça va de soi. Qu'on le fasse porter aux sportifs, je trouve que c'est absurde.

D'abord, parce qu'on a déjà essayé plusieurs fois, et que ça ne marche jamais. Deux, parce qu'ils ont toujours la possibilité de s'exprimer, et par des symboles, au contraire, de frapper l'imagination, comme ça s'est déjà fait très souvent. Trois, parce qu'en soi, l'esprit olympique, outre qu'il est populaire, que tout le monde attend de voir les Jeux Olympiques, mais l'esprit olympique c'est l'aboutissement pour les sportifs, et c'est aussi en soi, une idéologie de tolérance et de dialogue.

Mais derrière ça, la vraie question c'est qu'il serait quand même un peu paradoxal, alors que la question chinoise est une question politique, et pas une question sportive, qu'on demande aux sportifs d'en porter le poids, et que pendant ce temps là, les politiques eux, pourraient continuer le petit jeu de la diplomatie, des contrats, des échanges commerciaux. Ça serait réellement se défausser.

Est-ce que le Dalaï Lama a des moyens de pression vis à vis de la Chine ?

Plus qu'on ne le croit, parce qu'il a un moyen de pression essentiel, en dehors de sa liberté de parole, qui est la question de sa succession. S'il démissionnait, et il y songe, il y aurait un autre Dalaï Lama dans sa tradition d'autonomie et d'irrévérence vis-à-vis du pouvoir chinois, qui lui voudrait pouvoir désigner lui-même le prochain Dalaï Lama, évidemment à sa botte.

Auteur : Alain Duhamel



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