Depuis vendredi matin, les branches d'acier du monument étincellent parmi les 800.000 arbres ensemencés pour oxygéner le site des JO.
Cet enchevêtrement de cent mètres de long marquera la mémoire des premiers jeux organisés par la Chine. A l'image des jardins chinois, il cache un mystère. L'entrelacs de tubes forme une forêt d'acier abstraite. La structure bascule dans une quatrième dimension en un point précis, situé à 56 mètres de l'Allée des Athlètes. Là, selon l'art et la philosophie du feng-shui, le visiteur entre en harmonie avec l'espace. L'oeil reçoit la révélation d'un cercle de titans arrachant les anneaux olympiques à la terre pour les brandir dans le ciel de Pékin...
L'art et la politique
La sculpture, la plus grande et la plus chère créée dans le monde par un artiste belge, est un cadeau de la Belgique à la mairie de Pékin. Sa valeur est estimée entre 5 et 6 millions d'euros, en fonction du cours de l'acier. La somme a été réunie par la Loterie Nationale et un consortium de firmes belges. En remettant officiellement cet objet d'art au vice-maire de Pékin, le ministre des Affaires étrangères, Karel De Gucht, a exprimé l'espoir que l'Allée « contribue à la construction d'un monde plus harmonieux et plus juste, où les peuples feront preuve de respect mutuel » et où la Chine fera des progrès aussi spectaculaires « dans son développement économique que dans le champ des droits individuels et du respect de la diversité culturelle ».
Avec son physique de bouddha, Jean-Luc Dehaene lui a ravi la vedette, tout en assurant la promotion des bières belges d'Inbev, un des principaux sponsors du projet. L'ancien Premier ministre a été l'un des piliers de « Strebelle in Beijing », l'ASBL chargée de réunir les fonds pour ce projet. Il en assume jusqu'au bout la démesure : « C'est une oeuvre à la hauteur de la tour Eiffel et de l'Atomium. Il n'a pas été facile pour un petit pays comme la Belgique de réunir 5 millions d'euros. Le soutien officiel du gouvernement, celui de Guy Verhofstadt, a été déterminant. » Karel De Gucht, de son côté, n'hésite pas à comparer Strebelle à un géant baroque : « Strebelle est un excellent artiste comme Rubens, ce qui implique aussi d'être un peu homme d'affaires. »
François Narmont, président de « Strebelle in Beijing », a précisé que l'essentiel du budget était englouti dans la réalisation de l'oeuvre plutôt que dans sa création. « Le coût de l'acier a grimpé et il a fallu 20 tonnes de plus que prévu pour terminer la sculpture. L'ASBL accuse un déficit budgétaire de 10 %, mais nous avons planifié l'étalement des paiements jusqu'en 2009. Si cette oeuvre est la plus chère d'un artiste belge vivant, c'est aussi parce que c'est la plus exceptionnelle. Elle va aider les Chinois à connaître l'existence de la Belgique. »
© Rossel & Cie S.A. - LE SOIR Bruxelles, 2008
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