TEXTILE MALGRÉ UNE BONNE IMAGE, L'HEXAGONE SE CLASSE À LA NEUVIÈME PLACE DES EXPORTATEURS D'HABILLEMENT DANS LE PAYS
POUR des Français, vendre des vêtements en Chine, c'est jouer les David contre Goliath. De janvier à septembre 2008, Paris a exporté pour 19,9 millions d'euros de chiffre d'affaires dans l'habillement en Chine pendant que Pékin a exporté pour 2,748 milliards d'euros dans l'Hexagone, selon une étude de l'observatoire économique de l'Institut français de la mode (IFM).
Même si certaines marques françaises produisent en Chine, les industriels hexagonaux ne pèsent qu'un poids plume dans cette balance commerciale (1 % du marché de l'habillement en 2007). En 2007, ils n'étaient que les vingtièmes fournisseurs de la Chine dans ce secteur. Ils ont amélioré ce résultat en prenant, sur les neuf premiers mois de l'année, la neuvième place, après Hongkong, qui caracole en tête, suivi de l'Italie.
CONTREFAÇON
Cette étude de l'IFM bat en brèche des idées reçues : la Chine n'a pas vocation à rester l'atelier de confection du monde. Avec la hausse des salaires horaires moyens d'un ouvrier textile (0,55 dollar à l'intérieur du pays et 0,85 dollar sur la côte), les industriels chinois devraient rapidement sous-traiter dans des pays où la main-d'oeuvre est encore moins chère, comme l'Inde (0,69 dollar), le Vietnam (0,46) ou le Pakistan (0,42).
Pour l'auteur de l'étude, Franck Delpal, la Chine deviendra en 2010 le troisième marché mondial, en consommation de vêtements, devant le Japon. Avec de réelles disparités entre les ménages urbains et les ruraux.
Les citadins les plus fortunés se sont offert en moyenne, en 2007, plus de treize vêtements et presque quatre paires de chaussures. Ils ont augmenté de 15,5 % leurs dépenses en habillement entre 2006 et 2007. Le sportswear se vend bien chez les moins de 30 ans (soit 40 % de la population). Autres particularités : la contrefaçon est un sport national et le marché du prêt-à-porter reste plutôt féminin en Chine, tandis que le luxe est davantage acheté par des hommes.
" Le luxe exporte finalement très peu de vêtements en Chine, il existe donc un vrai décalage entre la force de l'image française du luxe et la faiblesse de la réalité du prêt-à-porter français sur le terrain ", admet Jean-Pierre Mocho, président de la Fédération française de prêt-à-porter féminin. Etam et Pierre Cardin restent les marques françaises les plus achetées dans les 260 plus grands magasins chinois.
" LA LÉGISLATION EST TRÈS LOURDE "
Présent depuis 1983, Eric Bompard, PDG de la société spécialisée dans le cachemire, va en Chine six ou sept fois par an vérifier que son joint-venture avec le leader de cette laine de chèvre de Mongolie fonctionne bien. Pour le premier de ses trois magasins, " le marché n'était pas tout à fait prêt. En Chine, le cachemire n'a pas, comme en France, l'image d'une matière luxueuse ", explique-t-il, tout en concédant " avoir dû un peu freiner sa stratégie d'expansion avec la crise ".
De son côté, Ari Zlotkin, directeur général d'Anne Fontaine - connu pour ses chemises blanches pour femmes - a essuyé les plâtres en s'implantant, en 2005, sans partenaire local à Shanghaï. " La législation est très lourde, les loyers augmentent de façon faramineuse et sont proches de ceux de Madison Avenue à New York, alors que la clientèle n'est pas encore là ", dit-il. Cette boutique, l'une des 80 du groupe dans le monde, est juste rentable et permet surtout " de capitaliser sur la croissance du pays et la construction de l'image de la marque ".
Agent distributeur, Wang Gang assure qu'il faut être suffisamment connu pour être demandé. Et d'assurer que Vuitton, bénéficiant de son image de pionnier du luxe est l'un des rares groupes français à pouvoir négocier en Chine des conditions de baux très avantageuses, puisqu'il sert de " locomotive " aux centres commerciaux. Une façon de rappeler que le succès va au succès.
Nicole Vulser
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