vendredi 16 janvier 2009

De nombreux étrangers empêtrés dans leurs coentreprises en Chine

Les Echos, no. 20343 - Industrie, vendredi, 16 janvier 2009, p. 19

Agroalimentaire

Touchés par la crise, de nombreux industriels étrangers cherchent à restructurer leurs activités en Chine, mais se heurtent aux lacunes du droit des coentreprises. Ils sont contraints de négocier leur sortie.

Les entreprises étrangères installées en Chine suivent avec beaucoup d'attention l'affaire Danone-Hangzhou Wahaha Group. Après avoir longtemps incarné un modèle de coopération, le géant français et son partenaire historique en Chine se livrent, depuis deux ans, une violente guerre judiciaire et peinent à mettre un terme à leur alliance. « C'est un cas d'école particulièrement pertinent en cette période de contraction économique », souffle un industriel européen.

Appâtées par la spectaculaire croissance de l'économie chinoise et l'ouverture progressive d'un marché de 1,3 milliard d'habitants, des milliers de sociétés étrangères ont investi dans l'empire du Milieu depuis la fin des années 1980 en association avec des partenaires locaux. Des coentreprises sino-étrangères ont ainsi vu le jour dans tous les secteurs. Mais le récent retournement conjoncturel a contraint nombre d'occidentaux à revoir leurs plans. Depuis septembre, les cabinets d'avocats de Pékin, de Shanghai ou de Guangzhou ont ainsi vécu une explosion des dossiers de restructuration d'activités ou de sortie du pays. « Nous nous retrouvons dès lors avec beaucoup de dossiers bloqués », constate Franck Desevedavy, un associé du cabinet UGGC dans la capitale chinoise.

Si le droit chinois des coentreprises est clair sur les modalités d'entrée des partenaires étrangers dans le pays et de gestion de la structure au quotidien, il est beaucoup plus flou concernant les procédures de sortie, qui se font souvent dans la douleur et rarement d'un commun accord.

Sortie par la négociation

Anticipant d'éventuelles complications, beaucoup de groupes étrangers ont, comme Danone, intégré à leur contrat de coentreprise la possibilité d'un recours devant une cour d'arbitrage étrangère dont la sentence est censée s'appliquer en Chine. Mais si Pékin a signé, dès 1987, la Convention de New York sur la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales étrangères, ses juridictions n'appliquent que très rarement ces décisions qui déjugent souvent celles de cours chinoises.

Le recours aux juges locaux, souvent liés aux pouvoirs politiques et économiques chinois, est rarement plus probant. La Cour suprême du pays reconnaît de toute façon que plus de la moitié des décisions de justice chinoises ne sont jamais exécutées. « Malheureusement, en Chine, on ne sort pas d'une société commune par une décision de justice quelle qu'elle soit, mais par une négociation », conclut l'avocat français. Des négociations qui s'achèvent souvent par une sortie désavantageuse pour le partenaire étranger ou même par des procédures de dissolution puis de liquidation traditionnellement dramatiques pour les intérêts occidentaux.

Conscientes des lacunes de leur droit des coentreprises, les autorités chinoises ont validé en juillet 2008 de nouveaux textes clarifiant les procédures de sortie de coentreprises ou de dissolution. Un nouveau droit qui commence à peine à être expérimenté.

YANN ROUSSEAU DE NOTRE CORRESPONDANT À PÉKIN.

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