lundi 13 avril 2009

ANALYSE - Washington, Pékin et les autres - Yves Thréard

Le Figaro, no. 20125 - Le Figaro, lundi, 13 avril 2009, p. 17

Pour des motifs différents, les dirigeants américains et chinois ont des raisons de ne pas noircir le tableau de la violente crise que traversent leur pays et le monde.

Barack Obama vient d'être élu. Il doit être à la hauteur de l'immense sympathie et confiance qu'il inspire. Normal. Le président des États-Unis, saluant le travail effectué par son équipe, s'est donc permis d'annoncer, vendredi, « une lueur d'espoir pour l'économie ».

En Chine, on entretient le même optimisme. « La situation est meilleure que celle que nous avions prévue », a déclaré, le même jour, le premier ministre Wen Jiabao. Propos rassurants, trompetés par l'ensemble des médias. Logique. Le régime communiste redoute par-dessus tout une montée des désordres et des jacqueries à l'intérieur du pays, qui pourrait lui être fatale.

À Washington comme à Pékin, le discours est évidemment politique, destiné à ragaillardir le moral des populations. Néanmoins, cette méthode Coué est soutenue par quelques éléments objectifs qu'il serait injuste d'ignorer.

Outre-Atlantique, les exportations ont cessé de chuter en mars, le nombre de prêts accordés aux petites entreprises augmente, les réductions fiscales font leur effet. Depuis un mois, l'indice ISM, qui jauge le climat des affaires, reprend des couleurs. L'excédent commercial chinois a, pour sa part, bondi de plus de 40 % en mars. Indicateur significatif de la météo économique internationale.

De fait, les principales Bourses mondiales ont connu un regain d'intérêt la semaine dernière. Celle de Shanghai a enregistré une hausse record de 34 % depuis le début de l'année. La remontée du cours des matières premières s'ajoutant à cela, quelques observateurs n'hésitent plus à parler de reprise prochaine. Selon une enquête menée par le Wall Street Journal auprès de 54 économistes, la récession prendra fin dans moins de six mois !

En vérité, nul ne saurait prédire le retour exact des beaux jours sans passer pour un inconscient face à tous ces salariés qui, eux, n'ont pas fini de payer de leur emploi le séisme actuel. Ici et là, les plans de relance n'ont pas encore eu d'incidences sur la vie réelle. Mais ils avaient d'abord pour objectif d'éviter le pire.

Il est, en revanche, une évidence confirmée par la crise. C'est entre Washington et Pékin que se situe aujourd'hui le centre de gravité de la planète. Se substituant au G8, le G20 est une heureuse initiative pour associer tous les continents à la marche du monde. Mais c'est de l'avenir des États-Unis et de la Chine que chacun dépend. Le premier vit et consomme grâce à l'argent prêté et aux produits fabriqués par le second. Lequel doit sa croissance et sa richesse à la demande de l'Oncle Sam. La « Chimerica » est au coeur du nouvel ordre économique. Partenariat qui n'est pas le moins paradoxal, considéré sous un angle politique.

À l'Europe, à la Russie et aux autres de jouer leur carte sans trop rechigner ni mauvaise humeur. Car c'est de cet horizon que reviendront les premiers rayons de soleil.

PHOTO - Des photographes attendent la réunion de l'ASEAN + 3 alors qu'elle a été annulée, le gouvernement thaïlandais ayant déclaré dimanche l'état d'urgence à Bangkok et autour de la capitale / REUTERS

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