mardi 14 avril 2009

La Corée du Nord annonce qu'elle met fin aux discussions sur sa dénucléarisation

Le Monde - International, mercredi, 15 avril 2009, p. 6

Le régime de Pyongyang a promptement répliqué à la condamnation, lundi 13 avril, par le Conseil de sécurité des Nations unies, du tir, le 5 avril, d'une fusée balistique. Il a annoncé, mardi, qu'il quittait les négociations à six (Chine, Corées, Etats-Unis, Japon et Russie) sur sa dénucléarisation, et qu'il allait reprendre son programme de production de plutonium.

Ce retrait des pourparlers comme la menace de reprise du programme nucléaire avaient été annoncés par la République populaire démocratique de Corée (RPDC) dans le cas où le Conseil de sécurité réagirait à ce qu'elle dit avoir été l'envoi dans l'espace d'un satellite de communication.

Rejetant " fermement " la décision du Conseil de sécurité, la RPDC estime que " les discussions à six n'ont plus de raison d'être ". " Nous entendons renforcer notre dissuasion nucléaire ", et " nous allons prendre les mesures nécessaires pour redémarrer nos installations nucléaires ", a annoncé le ministère des affaires étrangères nord-coréen.

En février 2007, la RPDC avait conclu un accord avec les autres parties aux négociations à six, par lequel elle s'engageait à désactiver, puis à démanteler, ses installations atomiques en échange d'assistance et de garanties de sécurité au fil d'un processus graduel.

La centrale de Yongbyon, qui a produit le plutonium utilisé dans un essai nucléaire souterrain, en 2006, avait été désactivée en juillet 2007 en présence d'experts de l'Agence internationale pour l'énergie atomique (AIEA), et sa tour de refroidissement avait été démolie un an plus tard. Depuis, les négociations se sont enlisées sur les modalités de vérification de la dénucléarisation de la RPDC.

Il faudra sans doute un certain temps pour la remise en route de la centrale. La RPDC semble de toute façon posséder déjà une bonne quantité de plutonium. Selig Harrison, du Centre international Woodrow-Wilson à Washington, l'un des rares Américains à se rendre fréquemment en RPDC, avait déclaré, à son retour de Pyongyang en janvier, que la RPDC aurait retraité 30,8 kilogrammes de plutonium. Suffisamment pour lui permettre de fabriquer de quatre à cinq bombes nucléaires.

Alors que Tokyo a salué comme un " grand succès " la déclaration du Conseil de sécurité - celle-ci est pourtant en retrait par rapport aux attentes japonaises et occidentales car elle n'est pas contraignante -, Moscou a exprimé son " regret " que Pyongyang se retire des pourparlers à six.

La réaction prévisible de Pyongyang va vraisemblablement provoquer une série de réactions diplomatiques, mais la plupart des observateurs estiment qu'elle ne ferme pas la porte au dialogue. Au lendemain du tir du 5 avril, l'ambassadeur américain Stephen Bosworth, chargé du dossier nord-coréen, avait rappelé que l'administration de Barack Obama souhaitait des pourparlers directs avec Pyongyang. La RPDC vient de " placer la barre " un peu plus haut.

Philippe Pons (avec Philippe Bolopion à New York, Nations unies)

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