Douze ans de tournage clandestin sur un impitoyable bureau des plaintes.
Lorsqu'il a commencé à tourner son film, en 1996, Zhao Liang avait 20 ans. Il ne l'a achevé que l'an dernier, juste avant les JO de Pékin, après douze années de tournage qui disent assez l'entêtement héroïque du réalisateur. Un tournage clandestin, parfois en caméra cachée, et que Zhao Liang a assumé entièrement seul.
Le sujet de Pétition - la Cour des plaignants est la chronique tragique de tout un petit peuple de Chinois pauvres et lésés qui viennent à la capitale pour déposer plainte dans les bureaux prévus à cet effet situés autour de la gare. Les bureaux sont là, les guichetiers aussi, mais ils ne servent à rien, sinon à décourager et à mieux fliquer encore ces victimes d'un système corrompu jusqu'à l'os. Les motifs de leurs plaintes sont divers mais toujours crève-coeur, comme le cas de cette femme admirable qui attend depuis 1987 qu'on lui explique comment et pourquoi son mari est mort «au cours d'un examen médical», ou ce vieux paysan qui réclame de l'Etat qu'il lui paye les céréales qu'il a livrées comme convenu et n'a reçu pour dédommagement que bastonnades cruelles et expulsion.
Cette Cour des plaignants est aussi celle des Miracles (qui ne se produisent pas, hélas pour eux) puisque c'est tout un bidonville de miséreux venus des quatre coins du pays qui en forme le violent décor. Echoués là dans l'attente d'une réparation qui ne viendra probablement jamais, ils sont les frères des héros des Bas-Fonds de Gorki. Leur sort est profondément déprimant, c'est vrai, tout comme l'est ce documentaire, mais leur résistance increvable, ainsi que celle du cinéaste, est aussi l'un des plus beaux rayons humains venus de Chine dernièrement.
Pétition - la Cour des plaignants de Zhao Liang (documentaire), 2 h 04.
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