Jusqu'au bout, les autorités chinoises auront tenté de dissuader Barack Obama d'imposer de nouvelles taxes aux importations de pneus chinois sur le sol américain. Jeudi soir, quelques heures avant l'annonce de la décision de la Maison-Blanche, le Premier ministre chinois, Wen Jiabao, avait vivement condamné, devant les hommes d'affaires et diplomates étrangers réunis à Dalian pour le World Economic Forum, les « tentations protectionnistes » qui, selon lui, mettraient en péril la reprise économique mondiale. « Nous sommes sur nos gardes », avait prévenu le chef du gouvernement.
A Washington, ses avertissements n'auront pas porté. Confronté, dans une période politique délicate, à un intense lobbying de l'un des plus puissants syndicats des travailleurs du pays (United Steelworkers), qui assure que plus de 5.000 emplois ont été récemment détruits par l'arrivée massive dans le pays de pneus bon marché « made in China », Barack Obama a décidé, vendredi dernier, d'imposer des droits de douane supplémentaires sur ces marchandises chinoises.« Ils s'agit de remédier à l'évidente distorsion dans le secteur américain du pneu », a justifié Robert Gibbs, le porte-parole de la Maison-Blanche, qui a affirmé que son pays avait seulement usé d'un droit prévu par l'Organisation mondiale du commerce lors de l'entrée de la Chine dans l'institution.
Une nouvelle taxe américaine
En 2001, Pékin avait effectivement validé l'idée d'une « clause de sauvegarde » permettant à ses partenaires économiques d'intervenir sous certaines conditions sur certains marchés, pour protéger leurs industriels contre de trop grandes « perturbations » provoquées par les flux de marchandises chinoises. Expliquant que la poussée de 255 % entre 2004 et 2008 de la part de marché du pneumatique chinois aux Etats-Unis - cette part a bondi de 4,7 % à 16,7 % - rendait possible l'utilisation de cette mesure, le gouvernement américain va, à partir du 26 septembre prochain, appliquer une nouvelle taxe de 35 % aux importations chinoises utilisées sur les voitures et les véhicules légers. Cette imposition, qui vient s'ajouter à une taxe de 4 % déjà en place, sera ramenée à 30 % au bout d'un an et à 25 % au bout de deux ans.
Une décision « malheureuse »
Outrées, les autorités chinoises ont dénoncé tout au long du week-end une décision « malheureuse » qui pourrait nuire à plus de 100.000 ouvriers chinois mais également à plus de 10.000 travailleurs américains dont les sociétés vivaient de la distribution de ces marchandises. Le ministre chinois du Commerce, Chen Deming, a fait savoir sur le site de son ministère qu'il prenait l'affaire très au sérieux. « Il s'agit d'un acte grave de protectionnisme commercial. Il ne viole pas seulement les règles de l'OMC, il va à l'encontre d'engagements pris par le gouvernement des Etats-Unis au sommet financier du G20 »,s'est emporté Yao Jian, son porte-parole, avant d'expliquer que l'initiative américaine risquait de déclencher « une réaction en chaîne de mesures commerciales protectionnistes » et pourrait même contraindre le gouvernement chinois à « adopter des mesures correspondantes ».Dès hier, la Chine a ouvert une enquête anti-dumping visant des pièces de voitures et des volailles en provenance des Etats-Unis, a indiqué le ministère chinois du commerce.
Yann Rousseau
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