mardi 27 octobre 2009

OPINION - Pékin prend l’initiative - Martine Bulard

Le Monde diplomatique - Manière de voir, numéro 107, octobre-novembre 2009 "Le basculement du monde".

En proposant de remplacer le dollar par une monnaie de réserve internationale, les dirigeants chinois ont surtout voulu prendre date. Leur pays ne se contentera plus d’un rôle secondaire sur la scène mondiale, même s’il n’est pas encore en mesure de se placer en position de superpuissance.

L’une finance, l’autre achète. La Chine, est devenue le banquier (le numéro un, sinon le seul) des États-Unis, qui dépensent sans compter pour acheter des marchandises fabriquées sur le territoire chinois - ces ventes permettent à Pékin d’accumuler des réserves qui lui serviront à prêter à Washington, qui importera des produits chinois… Cela dure depuis plus de deux décennies. Toutefois, avec la tourmente financière, l’Amérique en récession achète de moins en moins, et la Chine, en crise, se fait parfois tirer l’oreille pour continuer à mettre au « pot au noir » de la dette américaine.

Malgré ces grains de sable, la mécanique semble si bien huilée que l’on parle de plus en plus de « Chinamérique ». Une sorte de monstre à deux têtes, où faux-communiste et plus-vraiment-Iibéral s’allieraient pour diriger les affaires du monde. À elle seule, la formule est symbolique du basculement du monde économique et financier. Un groupe des deux (G2) est censé remplacer le club des huit puissances les plus riches du monde (G8).

II est vrai que Pékin possède la plus grande réserve mondiale de dollars : 2000 milliards, fin 2008. Cela représente plus des deux tiers d’une année de production chinoise. Ce qui confère quelque pouvoir… et responsabilités internationales. Si le tsunami emportait le système financier américain, entrainant le billet vert dans la tourmente, le pactole chinois se dégonflerait comme une baudruche. C’est d’ailleurs ce qui empêche la Chine d’arrêter la machine, de refuser de souscrire les prochains bons du Trésor américains ou de diminuer spectaculairement ses réserves de change en dollars. Toute chute du billet vert entrainerait une montée du yuan (et donc renchérirait les produits exportés); surtout, elle conduirait à une dévalorisation de ses réserves, un peu comme si, ces dernières décennies, la Chine avait été payée en monnaie de singe. Voilà qui peut calmer bien des ardeurs.

Autrement dit, les États-Unis ne peuvent pas plus se passer des financements de la Chine que Pékin ne peut se désintéresser du sort du géant américain. Dès l’explosion de la crise financière, dans un entretien au magazine américain Newsweek, le premier ministre chinois Wen Jiabao déclarait: « Nous devons nous unir. » « En ces temps si difficiles, a-t-il précisé, la Chine a rejoint les États-Unis. Et nous pensons qu’un tel coup de main devra aider à stabiliser l’économie et la finance mondiales, et empêcher un chaos majeur (1).» De là à dire qu’ils vont s’entendre comme larrons en foire pour dicter leur loi au monde, il y a un pas qu’il serait fort imprudent de franchir.

Si la Chine a conquis le rang de troisième puissance économique du monde - certains pronostiquent même sa montée à la deuxième place dès 2010, en raison de la chute du Japon -, elle n’en reste pas moins très éloignée du niveau américain. Son produit national brut représente la moitié de celui des États-Unis: 7800 milliards de dollars en 2008 (en parité de pouvoir d’achat), contre 14300 milliards de dollars.

Comme le résume parfaitement Dingli Shen, directeur de l’Institut d’études internationales à l’université Fudan de Shanghaï, « le temps n’est pas encore où la Chine serait sur un pied d’égalité avec les États-Unis, mais le changement relatif de centre de gravité doit lui donner confiance (2) ». Elle n’en manque pas vraiment. Elle entend même jouer de plus en plus fort sa propre partition pour défendre ses intérêts stratégiques - parfois en parfaite complicité avec le géant américain, parfois en totale dissonance.

Ainsi, à la veille de la réunion des vingt principaux pays développés et émergents du monde (G20) à Londres le 2 avril 2009, les dirigeants chinois ont lancé une petite bombe qui a secoué le landerneau monétaire : un acte d’accusation, en bonne et due forme, signé par le gouverneur de la Banque de Chine en personne, M. Zhou Xiaochuan : « L’éclatement de la crise et son débordement dans le monde entier reflètent les vulnérabilités inhérentes et les risques systémiques dans le système monétaire international » dont la monnaie pivot est le billet vert américain. En conséquence, il réclame une « monnaie de réserve internationale, déconnectée des nations individuelles » et de leurs objectifs purement internes; une monnaie « capable de rester stable sur le long terme ». Et de proposer une piste pour avancer dans cette voie : les droits de tirage spéciaux (DTS). Il s’agit d’une unité de compte, déterminée à partir d’un panier de monnaies, déjà utilisée par le Fonds monétaire international (FMI) et certains autres organismes, mais qui n’a aucun rôle international. Pour M. Zhou, ces DTS ont le « potentiel » pour devenir « monnaie de réserve supranationale ». Pris de court, le secrétaire d’État au Trésor, M. Timothy Geithner, s’est montré plutôt favorable à la proposition - entrainant immédiatement une chute du dollar avant de se rétracter.

En fait, en contestant ouvertement l’hégémonie du dollar et en plaidant pour une monnaie commune mondiale, Pékin a trois objectifs en tête. D’abord, empêcher toute mise en cause de sa propre monnaie, alors qu’à peine nommé, en janvier 2009, M. Geithner l’avait accusé de « manipuler sa monnaie ». Les autorités chinoises partent d’autant plus rapidement à l’offensive que le yuan, déjà notoirement sous-évalué, a stoppé sa (très) lente marche vers la réévaluation (+ 15 % vis-à-vis du dollar entre juillet 2005 et novembre 2008).

Deuxièmement, le gouvernement chinois craint une forte dévalorisation du dollar, entrainant une chute de ses énormes réserves. À commencer par ses 750 milliards de dollars de bons du Trésor accumulés fin février 2009. La crainte est fondée. Pour j’heure - et en l’absence de monnaie alternative - le billet vert est toujours demandé et sa valeur se maintient. Mais Washington fait marcher la planche à billets pour financer son plan de relance. Ce qui va immanquablement relancer l’inflation. Deux risques pointés, dès le 19 février 2009, par le très officiel People’s Daily ( Le Quotidien du peuple ), qui se demandait « d’où viendra l’argent du plan de relance américain? ». Et de désigner les dangers : « Voir le dollar perdre de sa valeur » (« pour les pays qui ont de fortes réserves étrangères en dollar; cela n’a rien d’une bonne affaire ») et « voir surgir une nouvelle vague d’inflation ».

Troisième et dernier objectif visé par le pouvoir chinois : obtenir rapidement des changements dans les règles de fonctionnement du FMI. Troisième économie mondiale, la Chine n’y dispose que de 3,6% des droits de vote; même le numéro deux mondial, le Japon n’en possède que 6% alors que les États-Unis s’en arrogent… 16,8 %. Comme le note le diplomate singapourien Kishore Mahbubani, « les Asiatiques, qui constituent plus de 53 % de la population mondiale (…), n’ont jamais pu diriger le FMI et la Banque mondiale. Selon des règles informelles mais incontournables, le dirigeant du FMI doit être obligatoirement européen et celui de la Banque mondiale, américain. Ce fonctionnement est d’un anachronisme total (3) ». Les États-Unis et les Européens ( les deux tiers des droits de vote dans l’instance internationale ) ne pourront durablement camper sur leurs positions : demander aux autres de financer et garder pour eux les leviers de commande.

D’une façon plus générale, le temps où les Occidentaux décidaient seuls des affaires du monde est révolu. La proposition chinoise de recourir aux DTS pour le commerce mondial a reçu un écho favorable dans les pays dits émergents. Dès le début 2009, Moscou avait réclamé des changements. M. Alexeï Koudrine, ministre des finances, déclarait que « la création d’une unité monétaire internationale est une initiative audacieuse qui nécessite une vision et un courage hors pair. (…) À court terme, la communauté internationale, et en particulier le FMI, devrait au moins reconnaitre le problème et faire face aux risques découlant du système actuel ». Il proposait lui aussi d’utiliser les DTS.

À la mi-juin 2009, pour leur premier sommet de chefs d’Etat, les BRIC - comme on dit pour désigner le Brésil, la Russie, l’Inde et la Chine ont rappelé qu’YJ1 « ordre mondial multipolaire » se met en place et réclamé « une réforme des institutions internationales qui doivent refléter les changements de l’économie mondiale ». Et notamment « un système monétaire plus diversifié ».

Le système actuel, né de l’après seconde guerre mondiale, reflète le rapport des forces politiques et économiques de l’époque. Les États-Unis sont les seuls à sortir plus riches du conflit. La Grande-Bretagne, endetté, est affaiblie; la France, à bout de souffle; l’Union soviétique, exsangue. Les accords de Bretton Woods - du nom de la ville du New Hampshire où sont définies les nouvelles règles financières en juillet 1944 - consacrent cette puissance. Ils affirment le rôle: pivot du dollar ( en lieu et place de la livre britannique ) et créent les deux institutions qui deviendront les bras armés de Washington: la Banque internationale pour la reconstruction et le développement ( BIRD, future Banque mondiale ) et le FMI. Le plan Marshall pour l’Europe est financé en dollars, pour affermir le poids du billet vert et assurer des débouchés aux productions américaines.

Un des célèbres négociateurs d’alors, John Maynard Keynes, essaie bien de s’opposer à cette mainmise en proposant un système monétaire fondé sur une unité de compte, une monnaie réellement internationale, le bancor. Le rapport des forces ne le permet pas. Le dollar s’impose et, avec lui, l’hégémonie des États-Unis sur le monde occidental. Les dirigeants américains peuvent faire ce qu’ils veulent, ce sont les autres qui paient. Quand la situation devient trop difficile, ils changent unilatéralement les règles du jeu. Selon l’expression fort célèbre du secrétaire américain au Trésor John Connally : « Le dollar est notre monnaie, mais il est votre problème. »

Ainsi, le 15 août 1971, le président Richard Nixon décrète que la monnaie américaine ne sera plus convertible en or. Il n’y aura plus que du papier, fluctuant au gré des marchés et des politiques américaines. Le « privilège exorbitant du dollar », dénoncé dès le milieu des années 1960 par le général de Gaulle, se renforce. Les gouvernements s’inclinent, les transactions commerciales se font principalement en billet vert, les banques centrales les engrangent ( aux côtés des marks, des yens, puis des euros… ). Aujourd’hui encore, ce système dollar domine la scène mondiale. Non seulement les États-Unis sont en mesure d’accumuler les dettes et de les faire acquitter par leurs «partenaires », mais ils peuvent à la fois attirer les capitaux sur leur territoire ( pour l’industrie, la recherche ou afin de renflouer des sociétés… ) et en exporter pour faciliter les implantations des multinationales à l’étranger. Si l’on considère l’ensemble des investissements directs étrangers ( IDE ) réalisés dans le monde en 2007, les États-Unis en demeurent les premiers bénéficiaires; ils sont également les premiers investisseurs à l’étranger. Ils jouissent ainsi d’un pouvoir exceptionnel de sélection géopolitique des capitaux.

Même s’il est toujours en vigueur, le système tremble sur ses bases. Les États qui ont accumulé des réserves ne se contentent plus de placer l’argent dans des banques comme l’avaient fait les pays exportateurs de pétrole dans les années 1970; ils ont créé ce que l’on nomme des « fonds souverains » ( 4000 milliards de dollars au moins ) qui servent à investir dans des projets de développement, plus ou moins pharaoniques comme dans les pays du Golfe, ou à racheter des sociétés étrangères. Une arme d’intervention que nombre de pays occidentaux craignent.

De plus, le poids du dollar dans les réserves de change mondiales a baissé de près de dix points en moins de dix ans: il représentait 62,4% des devises détenues par les banques centrales à la fin du premier semestre 2008, contre 71,2% fin 2000. Durant la même période, la part de l’euro est passée de 18,3% à 27 %. Symbole de la puissance japonaise des années 1970-1990 - laquelle poussait certains à pronostiquer ( déjà ) le « déclin américain » -, le yen a lui aussi décliné de 6,1% à 3,4 %. Cependant, ni l’euro ni bien sûr le yuan ne sont en mesure, pour l’heure, de prendre le relais du dollar. Seule la combinaison d’une puissance économique affirmée et d’une vision politique originale et attrayante peuvent faire basculer le système, ou, tout au moins, permettre de traiter d’égal à égal.

L’Union européenne, qui s’est engouffrée dans les délices de la dérèglementation à l’américaine, ne peut espérer relever ce défi. Moins touchée financièrement que les États-Unis, elle l’est tout autant voire plus dans les domaines économiques et sociaux. Sur le plan politique, l’Union demeure inexistante, et, contrairement à la fable médiatique, elle est restée « hors du coup » dans la crise. Certains de ses principes, présentés comme intangibles, sont même passés cul par-dessus bord - ce dont personne ne se plaindra. Adieu les critères de Maastricht qui devaient limiter les déficits publics. Exit le refus d’aides publiques aux groupes nationaux. Pas de programme unique d’action. Chaque État a adopté, peu ou prou, le plan de nationalisation bancaire défini à l’origine par le premier ministre travailliste Gordon Brown, le moins européen de tous, dirigeant d’un pays qui n’est même pas membre de la zone euro !

Quant à la Chine, elle n’est évidemment pas à l’abri de turbulences économiques et mêmes politiques. Les mouvements sociaux se développent. Au sein des équipes dirigeantes du Parti communiste et sur Internet, le débat prend corps sur la légitimité de la stratégie de ces dernières décennies. Le plan de relance exceptionnel lancé en novembre 2008 - 4 000 milliards de yuans, 465 milliards d’euros - a, dans un premier temps, permis d’éviter le pire. Pékin a conservé des instruments d’intervention publique, et sa croissance est arrimée à la production et à la recherche, ce qui n’est pas un détail. En effet, la crise systémique qui frappe les États-Unis et les pays européens montre que l’on ne peut durablement désarticuler les services et la finance de la production matérielle.

Bien sûr, le modèle de développement chinois est tiré par l’exportation ; la chute de la consommation chez ses deux principaux clients (les États-Unis et les pays de l’Union européenne) a entrainé une baisse des ventes et donc des volumes produits. Au début de l’année 2008, beaucoup de spécialistes tablaient sur un « découplage », la Chine poursuivant sa progression malgré l’effondrement des pays développés, 60 % de ses échanges commerciaux se réalisant avec les autres pays asiatiques. Mais, outre que ces derniers subissent eux aussi la crise ( le Japon est en pleine récession, la Corée du Sud souffre, l’Inde s’essouffle… ), entre la moitié et les deux tiers de ce commerce intra asiatique « termine sa course sur les marchés du G3 ( États-Unis, Union européenne et Japon ) », estime M. Sopanha Sa, économiste à la Société générale. Quand ce débouché se ferme, les conséquences sont immédiates: suppressions d’emplois ( de 20 à 25 millions selon les experts chinois en 2009 ), chômage élevé pour les jeunes diplômés ( 12 % officiellement, contre 4,6 % pour l’ensemble de la population ) et baisse des salaires ( entre 15 et 20% selon les études ).

Un éditorial - non signé - du People’s Daily résume parfaitement la situation : « Le mythe de Wall Street s’effondre », est-il écrit, et le commerce mondial est menacé. Mais surtout, « à long terme, les avantages relatifs du made in China pourront se réduire et la compétitivité de la Chine à l’exportation risque de s‘émousser. La géopolitique mondiale va devenir de plus en plus complexe, le néoprotectionnisme arriver et, dans l’avenir; les barrières commerciales plutôt grimper que diminuer (4). »

En somme, les autorités chinoises sont conscientes que s’ouvre une nouvelle phase; et elles cherchent d’autres relais de croissance. Le professeur Yang l’exprime sans détour: « Il n y a pas d’autre moyen que de développer le marché intérieur. Il faut désormais faire sérieusement ce que l’on annonce depuis longtemps. » Et notamment réduire les inégalités entre les villes et les campagnes. Déjà, la flambée des produits alimentaires a permis de relever le revenu des paysans de 17,9% au premier semestre 2008. Mais il ne suffit pas d’accroitre le pouvoir d’achat pour impulser la consommation : aujourd’hui, une partie de ce qui est gagné part dans l’épargne ( le plus haut taux du monde ), les familles mettant de l’argent de côté pour faire face à la maladie, ou à la retraite. Il faut donc simultanément continuer à construire un système efficace de sécurité sociale collective, encore embryonnaire, et augmenter les revenus.

Le plan de relance gouvernemental a mis l’accent sur la protection sociale, la reconstruction du système public de santé et, de façon plus immédiate, sur la réduction des taxes pour certains produits de consommation courante (électroménager. .. ). Les ressorts internes de la croissance ont déjà commencé à changer. Pour 2009, les spécialistes tablent sur une croissance aux alentours de 7 à 8% - ce qui ferait rêver n’importe quel dirigeant occidental. Mais, compte tenu des défis internes à relever (pauvreté, mécontentement paysan, fragilité politique des couches moyennes), descendre en deçà signerait assurément le début des ennuis. Ce qui n’est pas exclusif de la question désormais essentielle d’un nouveau mode de croissance, plus soucieux de l’environnement. Le second axe du plan de relance concerne les énergies vertes, les technologies de recyclage…

A l’extérieur, la Chine cherche à desserrer la contrainte du dollar. Ainsi, elle a recyclé une partie des excédents en Afrique et prêté des fonds, en dehors des conditions hier imposées par la Banque mondiale et le FMI. Elle multiplie les accords commerciaux bilatéraux pour assurer à la fois son approvisionnement énergétique (avec le Venezuela, la Russie, l’Irak, l’Iran) et de nouveaux débouchés (Japon, Inde… ). Elle autorise les pays dont les échanges commerciaux avec elle sont déficitaires à produire des obligations en yuans (et non en dollars) qu’elle souscrira. Un premier pas vers un yuan considéré monnaie de transaction.

Pékin a également appuyé la création du Fonds monétaire asiatique, lancé en mai 2008 avec le Japon et la Corée du Sud. Doté de 80 milliards de dollars, ce fonds leur garantit une solidarité financière ainsi qu’aux dix pays de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (Anase, Asean en anglais), sans passer par le FMI, de sinistre mémoire dans la région.

Des initiatives similaires sont prises dans d’autres régions du monde, toutes désireuses de s’émanciper du dollar. En Amérique latine, une Banque du Sud, qui réunit l’Argentine, la Bolivie, le Brésil, l’Équateur, le Paraguay, l’Uruguay et le Venezuela, vise à aider aux financements d’infrastructures, en dehors des instances de Bretton Woods. I..: Argentine et le Brésil ont décidé de payer leurs achats réciproques en monnaies locales, rayant le billet vert de leurs échanges. Comme on l’a vu, des liens institutionnels se nouent entre les BRIC. Le commerce Sud-Sud se développe à vive allure.

On reste encore loin d’un front uni susceptible d’imposer de nouvelles règles internationales qui détrôneraient le billet vert et ses béquilles institutionnelles, le FMI et la Banque mondiale. Mais des pistes se dessinent, telle celle du professeur Arvind Subramanian, qui, dans le Financial Times du 7 octobre 2008, imagine la Chine prêtant des fonds aux Etats-Unis sur le modèle des «conditionnalités» autrefois imposées par le FMI: les critères seraient cette fois publics (contrôle des banques) et sociaux (création de «filets de sécurité sociale»). La Chine, écrit-il, «se placerait en position de superpuissance ». Pour l’heure, Pékin n’en a ni le goût ni même les moyens. Mais demain?

Martine Bulard

(1) Entretien avec Fareed Zakaria, «We should join hands», Newsweek, New York, 6 octobre 2008.

(2) Propos rapportés par David Pilling, «America’s chance to kick ilS Asian addiction »,

Finallcia/nllles. Londres, 1″ octobre 2008.

(3) Kishore Mahbubani, Le Défi asiatique, Fayard, 2008.

(4) « Wall street turmoil tests China’s foreign trade » (« La tourmante de Wall street met à l’épreuve le commerce extérieur chinois »), People’s Daily, Pékin, 6 octobre 2008.

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