jeudi 5 novembre 2009

La foire de Canton célèbre prudemment la fin de la crise - Arnaud de la Grange

Le Figaro, no. 20300 - Le Figaro Économie, jeudi, 5 novembre 2009, p. 21

La plus grande exposition commerciale du monde s'est clôturée hier. La fréquentation est en hausse de 7,8 % en un an.

Les allées de la grande foire de l'automne de Canton, où le monde entier vient faire ses achats « made in China », se sont repeuplées depuis la précédente édition du printemps dernier, qui avait été catastrophique. Cette
106e foire, qui s'est terminée hier au coeur de « l'atelier du monde », a confirmé une amélioration des exportations chinoises, dont la chute s'est notablement ralentie.

Principale région exportatrice de Chine, dépendant à l'extrême de la demande mondiale, la province du Guangdong a été touchée de plein fouet par la crise. Sur les neuf premiers mois de l'année 2009, les exportations ont chuté de 21,3 % en glissement annuel. Or, le rythme de déclin s'est notablement modéré. Sur le seul mois de septembre, la chute n'a été que de 15,2 % pour l'ensemble de la Chine et de 12 % pour le Guangdong. L'un des organisateurs de la foire de Canton, qui a lieu deux fois par an, confirme la tendance. Selon Chen Chaoren, « 188 170 acheteurs étrangers ont participé à cette édition, soit 13,7 % de plus qu'au printemps dernier et 7,8 % de plus qu'à l'automne dernier ». Si le nombre de visiteurs européens et américains remonte, signe de l'amélioration en Occident, le plus spectaculaire reste la forte augmentation d'acheteurs venant du Moyen-Orient, de Russie et des pays d'Europe orientale. Le clignotant de la valeur des affaires conclues est lui aussi passé au vert. Le chiffre serait « en augmentation de 16,2 % par rapport au printemps dernier, même s'il reste encore en recul de 3,4 % par rapport à l'automne 2008 ». À l'époque, le coup de frein n'avait pas encore eu la brutalité des mois suivants.

Le high-tech prometteur

L'embellie reste donc à confirmer. « Il faut tenir compte des effets conjoncturels, la période de Noël approchant et les stocks s'épuisant, les entreprises occidentales ont fini par rouvrir le porte-monnaie et passer des commandes, confie un acheteur de linge de maison français, cela ne veut pas dire que le flux va être régulier dans les mois qui viennent. » Les vendeurs chinois sont d'ailleurs loin d'être euphoriques. « C'est mieux qu'en avril dernier mais moins bien qu'en 2007, confie Zhao Pei Ying, PDG de Yee Ang, fabricant de vélos d'appartement basé dans le Shanxi. Avant, ici, les accords se faisaient sur six mois. Aujourd'hui, les gens achètent un ou deux conteneurs et disent que l'on verra après. »

La reprise de la demande mondiale semble bien le vrai espoir des exposants de Canton. Tournées depuis des décennies vers l'exportation, ces entreprises ne misent guère à court terme sur une prise de relais par le marché intérieur chinois, leitmotiv de Pékin. « C'est une direction tracée, mais cela ne peut être une réalité à court terme, explique Mike Wang, directeur des ventes d'Andstar, une entreprise textile de Hangzhou, ce ne sont pas les mêmes produits et les réseaux de distribution à l'intérieur de la Chine n'existent pas forcément. Une telle réorientation prend du temps, coûte de l'argent. »

Les entreprises qui profitent le plus du plan de relance chinois de 400 milliards d'euros, qui va réussir à porter la croissance chinoise au-delà des 8 % visés pour 2009, ne sont donc pas toutes ces PME exportatrices. Il s'agit surtout des grosses entreprises d'État, tirées par l'envolée du crédit et les faramineux projets d'infrastructure. Cet écrémage au sein des PME ne déplaît pas au patron du Parti au Guangdong, le brillant Wang Yang. Ce sont les entreprises à faible valeur ajoutée, assemblant localement des composants souvent importés, qui souffrent et meurent le plus. Celles qui ont versé dans le high-tech tiennent beaucoup mieux le choc. La croissance future repose plus que jamais sur une montée en gamme de l'industrie chinoise.

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