La crise économique l'avait esquissé, la lutte contre le réchauffement le confirme. Le monde peut difficilement avancer sans le G2 : le tandem Chine-Etats-Unis. Le G2 avait été efficace pour limiter les conséquences de la crise financière au sein du G20, les deux pays aux économies imbriquées ayant intérêt à avancer de concert. Il l'a beaucoup moins été au sommet de Copenhague, où les tensions ont été vives entre Américains et Chinois.
Chacun avait des intérêts vitaux contradictoires. Les Chinois refusent d'entraver leur rattrapage économique et reprochent aux Américains leurs efforts insuffisants de réduction d'émissions de CO2. Les Américains, inquiets de la concurrence déloyale des Chinois, veulent pouvoir vérifier que Pékin respectera ses engagements.
Le conflit a conduit à une alliance objective. Les deux géants ont préservé l'essentiel : leur souveraineté. Les efforts en faveur du climat dont ils se sont tous deux vantés seront unilatéraux et non contraignants. " Nous honorerons notre parole par des actes. Quel que soit le résultat de la conférence ", a assuré le premier ministre chinois Wen Jiabao. Barack Obama a noté que " le protocole de Kyoto était juridiquement contraignant mais personne n'arrive à le respecter ". Pékin et Washington ont été rejoints par l'Inde qui ne veut pas non plus entraver sa croissance. A trois, ils représentent la moitié de la population mondiale.
Le sommet de Copenhague a confirmé le basculement du pouvoir autour du couple Chine-Etats-Unis. A peine son discours prononcé devant les 191 délégués, M. Obama s'est enfermé pendant 55 minutes avec M. Wen. Dans l'après-midi, la Maison Blanche a annoncé une seconde rencontre. Il s'agissait de convaincre M. Wen d'accepter un accord, alors que la Chine pratiquait la politique de la chaise vide dans la négociation qui tentait de sauver le sommet. A l'heure convenue, M. Obama a constaté que le président brésilien Lula, le premier ministre indien Manmohan Singh et le président sud-africain Jacob Zuma étaient aussi de la réunion. A cinq, les leaders ont négocié l'accord de trois pages qui a été présenté en séance.
" La relation entre les Etats-Unis et la Chine définira le XXIe siècle ", avait assuré en juillet M. Obama, soulignant la " responsabilité " portée, à ce titre, par les deux géants. C'est ce qui effraie la Chine, qui ne veut surtout pas s'engager dans une relation de cogestion du monde, et juge le concept de G2 inapproprié. " Certains émettent l'idée que les Etats-Unis et la Chine vont diriger le monde en commun. C'est une idée fausse et déraisonnable ", avait prévenu en mai M. Wen.
Au G20, le tandem a bien fonctionné et M. Obama en a profité pour lancer un " dialogue stratégique " étendant les domaines de coopération à l'environnement, les relations avec le Soudan, l'Iran ou le Zimbabwe. Mais la crise s'estompant, les deux géants se sont accusés l'un de rétablir des mesures protectionnistes, l'autre de continuer à sous-évaluer sa monnaie.
La visite de M. Obama en Chine en novembre n'a pas donné, côté américain, les résultats espérés, notamment sur l'Iran. Les Américains ne désespèrent pas de persuader Pékin que son sort est lié à celui du reste de la planète. Mais nombre d'experts soulignent qu'il est vain de parler de G2 tant que les Etats-Unis sont endettés pour 700 milliards de dollars auprès de la Chine, qui, elle, refuse la convertibilité de sa monnaie.
Arnaud Leparmentier, avec Corine Lesnes (à Washington) et Bruno Philip (à Pékin)
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