Bien que les changements soient encore très modestes, les intervenants du marché s'interrogent sur les conséquences de cette nouvelle orientation des autorités.
L'économie chinoise s'est extirpée avec vigueur du marasme dans lequel elle avait été entraînée en 2008. La reprise entamée début 2009 a été aussi rapide que l'avait été le déclin après la faillite de Lehman Brothers. La hausse du PIB au 4e trimestre s'inscrit à 10,7% en glissement annuel, ce qui confirme une opinion largement partagée: la Chine a joué un rôle central dans la sortie de la récession mondiale et restera un moteur essentiel de la croissance ces prochains trimestres. Cela étant, janvier 2010 a marqué le début de la normalisation de la politique monétaire chinoise. Bien que les changements soient encore très modestes, les intervenants du marché s'interrogent sur les conséquences de cette nouvelle orientation des autorités.
Dans ce contexte de reprise, la demande intérieure et les investissements dans les installations d'exploitation ont supplanté les exportations. La production de ciment, d'acier et d'électricité s'est envolée. Ces résultats sont conformes aux objectifs du programme de relance chinois. En effet, 45% des 580 milliards de dollars débloqués en novembre 2008 ont été alloués au développement des infrastructures de transport et du réseau électrique. Les indices mesurant le rythme de l'activité de construction en Chine indiquent aussi un important rebond depuis début 2009.
Sur le plan de l'économie intérieure, l'évaluation précise de l'état du marché du travail reste difficile. Néanmoins, les revenus des ménages et les ventes au détail se sont visiblement améliorés dans les zones urbaines. A la campagne, par contre, les revenus stagnent encore. L'exode rural massif, une tendance à long terme, va donc perdurer. En outre, l'envolée récente des exportations et des importations pourrait permettre au marché de l'emploi de sortir la tête de l'eau, les embauches augmentant grâce à la reprise de l'activité.
Les chiffres publiés plaident en faveur des responsables politiques chinois. Ils ont sorti le pays de la crise financière et de la récession et le pays n'a subi qu'un ralentissement limité et temporaire. Cependant, la solidité des perspectives de croissance fait surgir le spectre de l'inflation. En décembre 2009, l'indice des prix à la consommation (IPC) s'est en effet inscrit en hausse de 1,9% en glissement annuel, contre 0,6% le mois précédent. Certes, l'inflation générale reste faible, mais l'IPC chinois a évolué en territoire négatif une bonne partie de l'an dernier. Toutefois, le rythme de croissance des investissements dans les capacités de production, associé à la faiblesse persistante de la consommation aux Etats-Unis, en Europe et au Japon, devrait contenir l'inflation.
La Chine a récemment relevé les exigences de fonds propres pour les banques, augmenté les rendements des obligations gouvernementales locales et pris des mesures administratives visant à ralentir les octrois de nouveaux prêts. Malgré ce durcissement, la politique monétaire demeure très accommodante, comme en témoigne la croissance actuelle du crédit. En décembre, le nombre total de prêts accordés par les établissements financiers a bondi de 32% en rythme annuel.
Certains s'inquiètent de cette évolution, car elle risque d'entraîner une forte hausse des pertes sur prêts commerciaux. En effet, les prix chinois à l'exportation restent faibles et posent la question de la rentabilité du secteur des exportations dans son ensemble. Le risque de hausse du nombre de pertes sur crédits n'est donc pas négligeable.
Que les investisseurs se rassurent: les bénéfices des sociétés cotées sont repassés dans le vert. La Chine est souvent considérée comme l'une des premières nations exportatrices du monde. Or, le marché des actions H cotées à Hongkong comporte une majorité de sociétés dont le chiffre d'affaires est principalement lié à l'économie intérieure (télécoms et assurances, par exemple). Les pressions baissières exercées par la chute des prix finaux sur les bénéfices des exportateurs pourraient donc ne pas avoir de répercussion sur les sociétés cotées.
Les avis continuent de diverger quant à l'appréciation du renminbi. Certains considèrent que la monnaie chinoise reste fortement sous-évaluée et que son renforcement permettrait de relancer le pouvoir d'achat des consommateurs. Nous pensons que les monnaies d'Asie orientale sont susceptibles de grimper en 2010, mais prévoir quand et dans quelle mesure le renminbi s'insérera dans ce mouvement est difficile. Cette appréciation viendrait renforcer l'effet des mesures de resserrement monétaire, mais ses possibles répercussions sur le secteur des exportations pourraient inciter les autorités à remettre le durcissement de leur politique à plus tard.
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