mercredi 24 mars 2010

L'iPod d'Apple, paradoxe du « made in China » - Yann Rousseau

Les Echos, no. 20642 - International, mercredi, 24 mars 2010, p. 7

Aux responsables occidentaux qui pointent l'envolée des exportations chinoises, Pékin démontre que ces ventes profitent souvent à des groupes étrangers. Cas d'école avec l'iPod.

Face aux critiques occidentales qui l'accusent d'inonder la planète de produits « made in China », Pékin tente régulièrement de mettre en lumière la mauvaise lecture faite des statistiques de leur commerce extérieur. Il y a quelques jours, Wen Jiabao, le Premier ministre, a souligné que « 50 % de nos échanges ne sont en fait qu'un commerce de transformation ». Dans une étude publiée l'an dernier, les chercheurs Robert Koopman et Zhi Wang de l'US International Trade Commission avaient démontré que près de la moitié des exportations chinoises étaient constituées de composants étrangers, préalablement importés du Japon, de Corée, de Singapour ou de Taiwan. « Dans les secteurs nécessitant beaucoup de main-d'oeuvre peu qualifiée, comme le textile, la part de contenu domestique est forte dans les exportations chinoises. Dans les secteurs sophistiqués, tels que l'informatique, l'électronique ou l'équipement télécom, la part de contenu chinois est très faible », avaient détaillé les chercheurs.

4 dollars par iPod pour la Chine

Poursuivant cette analyse, trois économistes de l'université de Californie (UC Irvine) ont décortiqué le processus de fabrication d'un iPod Apple de cinquième génération. L'appareil est constitué de 451 pièces achetées à différentes sociétés asiatiques et assemblé en Chine dans des usines du taïwanais Foxconn. Toshiba fournit le disque dur des lecteurs, qu'il fait fabriquer aux Philippines ou en Chine. Chaque disque dur est facturé 73 dollars à Apple, mais seulement une vingtaine de dollars reviennent à Toshiba, qui doit lui-même payer les pièces détachées et le coût de production dans différents pays. Les américains Broadcom et PortalPlayer apportent les puces multimédias , en grande partie produites à Taiwan et la carte mémoire est achetée au coréen Samsung. Résultat : les sociétés américaines, intervenant dans la distribution finale, la fourniture de quelques composants ou la conception de l'appareil, perçoivent au total 163 dollars pour chaque vente de 299 dollars - Apple touche 80 dollars par unité. Les sociétés japonaises engrangent, elles, une valeur ajoutée de 26 dollars sur chaque appareil. La Chine ne perçoit que 4 dollars par iPod pour un appareil qui apparaîtra pourtant comme une importation chinoise de 150 dollars dans les statistiques commerciales des Etats-Unis.

© 2010 Les Echos. Tous droits réservés.

Bookmark and Share

0 commentaires: