Cet ecrivain-blogueur est l'un des esprits les plus critiques et les plus frondeurs de la génération des moins de 30 ans. Il a des centaines de milliers de fans.
A 27 ans, ce Shanghaïen d'origine se donne encore des allures de jeune rebelle adolescent. Cheveux mi-longs, collier de surfeur, pantalons serrés... Han Han surveille son look. Ce narcisse que l'on pourrait à première vue confondre avec de nombreux chanteurs pop à la mode, est pourtant l'un des esprits les plus critiques et les plus frondeurs de sa génération, les «post-80»: ces jeunes Chinois de moins de 30 ans, nés pendant l'ère Deng Xiaoping.
Auteur d'une quinzaine de romans - dont le premier San Chong Men, écrit à 17 ans s'est vendu à plus d'un million d'exemplaires -, Han Han est, selon les avis recueillis, «un provocateur», «un insoumis», «un résistant». «Il s'oppose au modèle que tente d'imposer notre société», résume un admirateur sur le site sina.com, portail qui héberge le blog de Han Han, l'un des plus consultés du Web chinois (plus de 200?millions de visites par an, après seulement trois années d'existence).
Education, rapport à l'autorité, nationalisme, censure, l'écrivain-blogueur (qui fut aussi pilote de rallye professionnel) y fait flèche de tout bois. Chaque jour ou presque, il «poste» un papier d'humeur lu instantanément par des centaines de milliers de fans. Chantre d'une Chine nettoyée de ses élites corrompues, il n'hésite pas à critiquer les hauts cadres du régime, spécialement ceux en charge des questions culturelles qui ont, d'après lui, «l'esprit confus» et dont personne «ne sait vraiment ce qu'ils pensent». «En Chine tous ceux qui critiquent le Parti et son pouvoir sont des dangers pour la stabilité sociale», assénait-il fin janvier lors d'un forum sur la culture organisée à Xiamen, dans le Fujian.
Chouchouté par les nouveaux médias chinois - l'hebdomadaire Xin Zhoukan de Canton juge sa pensée «juste et ordonnée» - Han Han sait toutefois les limites à ne pas franchir. «Quand j'écris, il y a des alarmes dans ma tête, reconnaît-il. Je n'écris jamais sur le Xinjiang ou le Tibet par exemple.» Silence également quand Liu Xiaobo, coauteur de la Charte 08 réclamant une Chine démocratique, est condamné en appel début février à 11?ans de prison.
«Han Han n'est pas un penseur, analyse un professeur de science politique à Pékin. Il plaît aux jeunes de sa génération car il sait parler le même langage qu'eux. Mais pour de nombreux vieux écrivains, il n'est qu'un agitateur qui n'a pas grand-chose à dire», un petit trublion sans diplôme (il a volontairement arrêté ses études au lycée) «starifié par l'Internet».
Pourtant, son style fait mouche. Ses billets incendiaires sur le système éducatif chinois, qu'il déteste, sont de véritables «buzz» commentés par une multitude de lycéens et d'étudiants, obligés de supporter un enseignement basé sur l'appris par coeur. En février 2009, ils sont également des centaines de milliers à applaudir quand il critique l'embargo des médias officiels, qui a duré plusieurs jours, sur l'incendie de la tour de la télévision CCTV à Pékin. En début d'année encore, le refus opposé par les autorités à un projet de magazine littéraire qu'il se proposait de financer et d'animer met le Net chinois en ébullition. «Il a tout pour lui», note une Pékinoise de 26 ans. «Il est beau, il est riche et il sait faire parler de lui.»
Romain Guillaume, Pékin
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