mardi 23 mars 2010

Rio Tinto : le procès chinois s'ouvre sur un aveu de culpabilité - Massimo Prandi

Les Echos, no. 20641 - Marchés, mardi, 23 mars 2010, p. 37

Une cour de Shanghai examine depuis hier les graves accusations portées contre quatre représentants de Rio Tinto. Tom Albanese, le patron de Rio Tinto, multiplie les offres de partenariat aux Chinois en vue de normaliser leurs relations.

Le procès des quatre hommes de Rio Tinto emprisonnés à Shanghai depuis début juillet 2009 a commencé hier devant la première cour du peuple de Shanghai sur un coup de théâtre. Stern Hu, l'ancien responsable pour Rio Tinto des négociations avec les sidérurgistes chinois sur le minerai de fer, a plaidé coupable de corruption. Selon ses accusateurs, il aurait reçu en pots-de-vin l'équivalent en yuans d'environ 800.000-900.000 dollars américains. Né de parents chinois, mais de nationalité australienne, Stern Hu et ses trois compagnons d'infortune, également accusés de corruption, risquent quinze ans de prison au maximum pour ce type de crime. L'accusation a requis plus de cinq ans de détention. L'affaire est suivie avec attention par les milieux d'affaires du monde entier, car le sort des quatre hommes est devenu un test important de la liberté réelle dont bénéficient les entreprises étrangères implantées en Chine. Le gouvernement australien suit de près le procès et, à l'instar de Rio Tinto, multiplie les demandes d'un jugement rapide, équitable et transparent. Appelant à ne pas « politiser » le dossier, Pékin n'a cependant donné aucune assurance tangible dans ce sens, exception faite pour la durée des audiences qui se termineront demain. Les représentants de Canberra ont été empêchés d'assister à la partie du procès qui porte sur des vols présumés de secrets d'Etat. Les journalistes de plus de 40 organes de presse internationaux et locaux ont été logés à la même enseigne, mis à part un ou deux titres de la presse officielle.

Hier toujours, le patron de Rio Tinto, Tom Albanese, s'adressait aux participants triés sur le volet au Forum du développement de la Chine. Fréquentée par des hauts dignitaires du régime, cette réunion lui a fourni une tribune de choix pour plaider en faveur de la normalisation des relations entre son entreprise et les autorités chinoises. Relations sérieusement entachées début juin 2009 (un mois avant l'arrestation des quatre de Shanghai) par la rupture par Rio Tinto du projet de partenariat stratégique avec Chinalco, un puissant holding minier et métallurgique propriété de l'Etat chinois, détenteur de 9 % du capital du groupe minier anglo-australien.

Premier client du groupe

La première visite « officielle » - la deuxième en un mois -dans l'ancien empire du Milieu de Tom Albanese intervient aussi au moment où Rio Tinto et Chinalco renouent des rapports industriels en s'associant pour l'exploitation du grand gisement de minerai de fer de Simandou, en Guinée (« Les Echos » d'hier). Après avoir rappelé que sa compagnie opère dans ce pays depuis cinquante ans, le patron de Rio Tinto a souligné que la Chine est devenue aujourd'hui le premier client du groupe. Il a ensuite brièvement évoqué le procès de ses employés, en exprimant sa plus grande préoccupation en se cantonnant à dire qu'il attend « respectueusement » les résultats. Enfin, Tom Albanese a développé deux idées de partenariats ultérieurs avec des sociétés publiques chinoises. La première porte sur l'aide que Rio Tinto se promet d'apporter dans la recherche et dans le développement de nouveaux gisements de minerai à l'étranger. L'accord sur Simandou « est un premier pas » dans cette direction, a déclaré Tom Albanese. La seconde concerne l'assistance que Rio Tinto propose aux Chinois pour trouver des ressources minérales sur leur propre territoire. Autant de propositions qui pourraient rendre moins sévère le jugement de Stern Hu et de ses trois collègues chinois.

MASSIMO PRANDI

PHOTO - Australian Consul-General Tom Connor (C) makes a statement to the media outside the Shanghai No. 1 Intermediate People's Court in Shanghai on March 22, 2010 following the first day in the trial of four Rio Tinto employees. Australian Rio Tinto executive Stern Hu and a Chinese fellow employee will plead guilty to bribe-taking at the politically charged trial which opened on March 22, a defence lawyer was quoted as saying.

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