jeudi 1 avril 2010

La montée en puissance de la Chine inquiète Armateurs de France

Les Echos, no. 20648 - Services, jeudi, 1 avril 2010, p. 27

La crise du transport maritime aurait dû entraîner de fortes annulations de bateaux en commande. Mais les armateurs chinois profitent des nouveaux prix des chantiers navals pour se constituer une flotte à moindre coût. Face à cette offensive, la fédération patronale française oeuvre pour préserver la compétitivité de ses entreprises.

La Chine profiterait-elle de la crise du transport maritime et de la construction navale pour renforcer sa flotte à bon compte ? Président d'Armateurs de France, Christian Garin en est persuadé. A l'occasion de l'assemblée générale annuelle de la fédération patronale, il a estimé que les annulations massives de commandes de navires, prévues l'an passé dans le transport d'hydrocarbures, de conteneurs ou de marchandises en vrac pour lutter contre la surcapacité de transport, n'ont pas eu lieu, ayant finalement laissé la place à de simples reports de livraisons vers 2013 ou 2014. Ce constat peut, pour partie, s'expliquer par la crainte pour un armateur mis sous pression par ses créanciers de subir une triple peine : perdre les acomptes déjà versés en cas d'annulation d'une commande, voir le chantier naval revendre, à prix cassé, le navire annulé à un transporteur concurrent et, au final, manquer de bateaux quand la demande repartira. Mais, pour Christian Garin, un autre élément joue : « A partir du printemps 2009, on a vu apparaître des fonds d'investissement créés par des Chinois pour acheter des navires qui étaient désarmés, mais surtout pour en commander d'autres, profitant des nouveaux prix consentis par les chantiers navals pour se constituer une flotte à moindre coût. » Alors que certains armateurs chinois, tels Cosco ou China Shipping, se classent déjà parmi les grands transporteurs maritimes mondiaux, le président d'Armateurs de France voit dans ce fait la volonté de la part de la Chine de contrôler sous son pavillon une part croissante de ses exportations.

Des réponses politiques

Dans ces conditions, la fédération estime primordial de préserver la compétitivité de la flotte française. Dans le cadre du plan de relance, elle a ainsi obtenu l'an dernier l'éligibilité des entreprises de transport et de services maritimes à la garantie de financement Oséo, qui leur permet, pour sept ans et dans la limite de 15 millions d'euros, de négocier plus sereinement avec leurs banquiers engagés dans le financement de navires commandés avant la crise. Au-delà de ce coup de pouce, Armateurs de France a en grande partie gagné son combat contre des aspects fiscaux du projet de loi de Finances 2010 qui ne lui convenaient pas (par exemple, l'instauration de la TVA sur la restauration à bord des navires) et se félicite évidemment du tout récent enterrement de la taxe carbone. A plus long terme, la fédération applaudit la réforme de la formation des quatre écoles nationales de la marine marchande, désormais rassemblées au sein d'un même établissement public et qui, grâce à une montée en qualité de l'enseignement, pourront dans cinq ans délivrer leurs premiers diplômes d'ingénieur. Reste à améliorer la compétitivité du navigant français par rapport à ses collègues européens. A salaire brut égal, il gagne de 25 % à 30 % de moins en net, ses charges sociales n'étant pas exonérées. La demande d'exonération de ces charges n'ayant pas abouti, Armateurs de France compte reprendre le dossier à zéro.

CLAUDE BARJONET

Encadré(s) :

De Corse Air International à Corsairfly

1990. Corse Air International, repris par Nouvelles Frontières, devient Corsair. Il est autorisé à desservir les Antilles. 1992-1997. Acquisition et renouvellement de plusieurs Boeing pour ses dessertes aériennes. 2001. Corsair ouvre son capital à Preussag, premier voyagiste européen. 2002. TUI (ex-Preussag), prend le contrôle total de Nouvelles Frontières. Première grève générale de l'histoire du transporteur. 2003. Ouverture du site Internet Corsair. Lancement de la première campagne de publicité. 2007. Corsair devient Corsairfly. Signature d'un partenariat commercial avec Air Canada. 2009. Ouverture de lignes vers l'Amérique du Nord. Report du renouvellement de la flotte pour cause de résultats déficitaires.

CLAUDE BARJONET

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