La crise de la zone euro est-elle suffisamment grave pour justifier une intervention concertée des banques centrales de Chine, du Japon et de la Suisse ? Une opération exceptionnelle a-t-elle été menée pour racheter de l'euro et enrayer son plongeon ? C'est en tout cas la rumeur qui bruissaient, jeudi 21 mai, dans les salles de marchés.
Justifiés ou non, ces bruits ont contribué au rebond spectaculaire de l'euro. Après avoir dégringolé sous le seuil de 1,22 dollar, mercredi 19 mai, la monnaie unique s'échangeait à plus de 1,26 dollar dans la matinée de vendredi.
De fait, la chute de la devise européenne, bien qu'involontaire, fait office de dévaluation compétitive plutôt salutaire pour le Vieux Continent mais elle est néfaste pour ses partenaires non européens. Au Japon l'appréciation du yen face à l'euro, à même de casser une reprise encore hésitante, inquiète ainsi particulièrement les milieux politiques.
Leurs craintes sont d'autant plus justifiées que la crise de la zone euro semble bien loin de se résoudre. Depuis l'accord obtenu pour la mise en place d'un plan de stabilisation de la zone euro de 750 milliards d'euros, les dissensions entre les dirigeants européens apparaissent au grand jour.
" Christine Lagarde, - la ministre française de l'économie - , et Wolfgang Schäuble, - son homologue en Allemagne - , ne se cachent plus pour s'échanger des amabilités ", se désole ainsi René Defossez, stratège sur les marchés de taux chez Natixis.
Nervosité grandissante
Ce climat électrique alimente une nervosité grandissante sur les places financières du monde entier. Jeudi, le CAC 40 a notamment reculé de 2,25 % après avoir perdu en séance plus de 3 %, la Bourse de Francfort elle a reculé de 2,02 % tandis que le Nikkei à Tokyo cédait vendredi plus de 2,5 %.
Un éclatement de la zone euro semble aux yeux de certains un scénario de plus en plausible. " La psychose est revenue ! Les Cassandre sont de retour ", s'inquiète Marc Touati, directeur des études économiques de la société de Bourse Global Equities.
Les investisseurs tentent maintenant d'imaginer la suite des événements. Si les déboires de l'Europe s'accentuent, la reprise sur le Vieux Continent pourrait être compromise. Par ricochet c'est alors toute la croissance mondiale qui serait affectée.
Les investisseurs redoutent en premier lieu que la demande de matières premières, de pétrole, de gaz, de produits agricoles et de minerais ne s'effondre ou pour le moins ne fléchisse. Les victimes sont déjà désignées par les marchés. Il en est ainsi de l'Ukraine où la Bourse a reculé de plus de 11 % jeudi. Le géant américain de l'aluminium, Alcoa, a lui enregistré la plus forte baisse du marché américain : - 5,9 %.
A Wall Street les investisseurs ont été d'autant plus échaudés que s'est votée, jeudi, au Sénat la plus importe réforme financière depuis la crise de 1929. Le projet doit certes encore être rapproché de la version votée plus tôt par la Chambre des représentants. Mais le chef de la majorité démocrate au Sénat, Harry Reid, a déjà prévenu : " Le rodéo à Wall Street sera bientôt terminé. "
Le message a été reçu cinq sur cinq par les marchés : le Dow Jones, indice phare de la place de New York a plongé de 3,60 %. Les banques telles Citigroup (- 4,72 %) ou JP Morgan Chase (- 3,94 %) ont été particulièrement sanctionnées : si la réforme est bouclée les établissements financiers seront bridés dans certaines de leurs activités spéculatives et leurs profits devraient fondre.
" Globalement le climat n'est pas terrible ", résume Jean-Louis Mourier chez Aurel BGC.
Claire Gatinois
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