La Corée du Sud a annoncé, lundi 24 mai, qu'elle entendait saisir le Conseil de sécurité des Nations unies de l'affaire du naufrage de l'une de ses unités navales, la corvette Cheonan, coulée en mars en mer Jaune, dont la responsabilité a été imputée par une commission d'enquête internationale à un sous-marin nord-coréen.
Séoul, qui exige " excuses " et " punitions " pour cette " provocation militaire ", a mis en garde son voisin du Nord contre toute nouvelle action similaire qui entraînerait une riposte au titre du " droit à l'autodéfense ".
Dans une allocution télévisée à la nation, prononcée symboliquement devant le Mémorial de la guerre de Corée (1950-1953) à Séoul, le président Lee Myung-bak a déclaré que son pays " ne tolérerait plus aucun acte de provocation ". " J'appelle solennellement les autorités nord-coréennes à présenter des excuses immédiates à la République de Corée et à la communauté internationale ", a-t-il poursuivi. En cas de nouvelle provocation, la Corée du Sud " ne s'abstiendra pas de répondre par une action militaire ", a mis en garde le président.
" Guerre généralisée "
Citant l'attentat à la bombe à Rangoon qui, en 1983, avait coûté la vie à 17 membres du gouvernement sud-coréen et un autre, en 1987, contre un appareil civil de Korean Air (115 victimes), le président Lee a déclaré : " Désormais les choses ont changé. La Corée du Nord doit payer le prix de ses actes de provocation. " L'avertissement lancé par Séoul fait écho à celui adressé à la Corée du Sud par Pyongyang, qui a démenti toute implication dans le naufrage et a menacé d'une " guerre généralisée " si de nouvelles sanctions étaient prises à son encontre.
Le président Lee a annoncé que les derniers liens économiques avec le Nord seront coupés et que les navires de commerce nord-coréens ne seront plus autorisés à transiter par les eaux territoriales du Sud. La zone industrielle de Kaesong (située en République populaire démocratique de Corée, RPDC), où ont investi une centaine d'entreprises sud-coréennes qui emploient 40 000 Coréens du Nord, n'est pas affectée par ces mesures, mais le nombre des cadres sud-coréens sera réduit.
De son côté, la Maison Blanche a annoncé, dans un communiqué publié très tôt lundi, que " le président - Barack Obama avait - ordonné aux services du gouvernement américain de revoir les politiques liées à la République populaire et démocratique de Corée ".
Au cours de sa visite à Tokyo, première étape d'une tournée asiatique qui l'a conduite à Pékin où elle se trouve actuellement et qui s'achèvera à Séoul, la secrétaire d'Etat américaine, Hillary Clinton, avait adopté un ton ferme exigeant que la RPDC " mette fin à ses provocations ". " Nous ne pouvons laisser cette attaque sans réponse de la communauté internationale (...). Il faut une réponse internationale, pas simplement régionale ", a-t-elle déclaré avant de préciser, lundi, que Washington s'efforcera " d'éviter une escalade ".
Le soutien diplomatique des Etats-Unis et des alliés de la Corée du Sud (Japon et Union européenne), paraît acquis à Séoul, mais l'attitude réservée de la Chine et la prudence de la Russie dans cette affaire ne lui garantissent pas une décision unanime au Conseil de sécurité. Pékin, en particulier, réclame davantage de preuves avant de condamner son voisin et allié nord-coréen.
La proposition inhabituelle de Pyongyang d'envoyer une équipe d'enquêteurs à Séoul pour examiner les preuves retenues contre la RPDC place la Corée du Sud dans une situation embarrassante : refuser peut entamer sa crédibilité si la Chine et la Russie sont favorables à cette initiative.
La Commission militaire d'armistice du commandement des Nations unies en Corée du Sud - présent dans la péninsule depuis la guerre de 1950-1953 - pourrait proposer une enquête conjointe, a déclaré un membre du gouvernement, resté anonyme, à l'agence de presse sud-coréenne Yonhap.
La commission, dont fait partie la France, devrait en tout cas enquêter afin de déterminer si le naufrage du Cheonan constitue une violation de l'accord d'armistice de 1953.
Philippe Pons
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