JEAN-PIERRE CLAMADIEU PDG DE RHODIA
Rhodia vient de conclure sa première grande acquisition depuis le début de la crise. Pour 489 milions de dollars, le groupe prend le contrôle de Feixiang Chemicals, une société de 650 personnes implantée à Zhangjiagang, à 110 kilomètres de Shanghai. Son PDG explique aux « Echos » l'enjeu de l'opération.
Vous annoncez une acquisition en Chine. Cela signifie que, pour vous, la crise est finie ?
Nous sortons effectivement de la crise avec une dynamique très forte, et une stratégie axée sur la croissance. Cette acquisition en constitue la première grande étape. Elle nous permet de nous renforcer en Asie, la région du monde qui bénéficie de la plus forte expansion, et dans un métier, les surfactants, que nous avons identifié comme une base de développement pour Rhodia.
Quel est l'intérêt de ce marché ?
Les surfactants ou tensioactifs sont des composants qui modifient les qualités de surface des produits. On les utilise pour faire des shampoings, des détergents, mais aussi dans l'exploitation pétrolière ou l'agrochimie. C'est un marché qui a bien résisté à la crise, et qui est encore assez fragmenté. Il y a des choses à faire.
Avec l'acquisition de Cognis par BASF qui semble en passe d'être conclue, la concentration est en marche...
C'est pourquoi il était très important pour nous de grandir dans ce secteur, et nous avons étudié plusieurs pistes depuis un an. Feixiang Chemicals nous est apparu comme spécialement intéressant. D'une part, la technologie des amines que maîtrise cette entreprise est très complémentaire de nos produits. D'autre part, c'est une société en forte croissance, de l'ordre de 20 % par an et très rentable. Cette année, elle devrait dégager un excédent brut d'exploitation d'un peu plus de 50 millions de dollars, sur un chiffre d'affaires légèrement supérieur à 250 millions de dollars.
Elle était à vendre ?
Non. Mais l'entrepreneur chinois qui l'a fondée il y a dix ans voulait l'internationaliser. Il avait fait entrer Bain Capital à son tour de table, avec un peu plus de 20 %. Et il s'est rendu compte qu'il ne pouvait guère aller plus loin tout seul.
Combien payez-vous ?
Le prix est fondé sur une valeur d'entreprise de 489 millions de dollars pour 100 % du capital, soit 9 fois l'excédent brut d'exploitation attendu cette année. C'est un prix raisonnable, en ligne avec les transactions dans le secteur. Nous avons demandé au fondateur de garder 12,5 % pendant deux ans, pour faciliter la transition.
Allez-vous vous endetter pour financer l'opération ?
Non, nous pouvons payer en utilisant le cash de Rhodia.
Les autorités chinoises chargées de la concurrence auront leur mot à dire...
Oui, mais nous n'anticipons pas de difficulté technique ni politique. La nouvelle entité sera leader en Chine, sans avoir une position dominante. Mondialement, cela conforte notre position dans le trio de tête, derrière l'allemand Cognis et le britannique Croda.
Cette transaction va-t-elle changer le profil de Rhodia ?
Désormais, l'Asie pèsera presque autant que l'Europe dans le chiffre d'affaires ! A eux seuls, l'Asie et le Brésil représenteront pratiquement la moitié de notre activité.
En Europe, certains s'inquiètent d'une possible rechute conjoncturelle. Etes-vous inquiet ?
Aujourd'hui, nous ne percevons aucun signe de ralentissement en Europe. La crise financière et politique de mai n'a eu aucun impact sur les commandes. Et elle a fait baisser l'euro, un point positif pour un exportateur comme Rhodia. En année pleine, un euro qui passe de 1,40 à 1,20 dollar améliore notre excédent brut d'exploitation de 70 millions d'euros.
Les syndicats ont évoqué la vente des vos activités dans l'aspirine. Qu'en est-il ?
Le processus, stoppé pendant la crise, a été relancé, et nous avons reçu plusieurs marques d'intérêt. L'opération marquera la fin de notre recentrage.
PROPOS RECUEILLIS PAR DENIS COSNARD
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