Dans la capitale de la province du Zhejiang, les célébrations rassemblent près de 5 000 personnes.
Les bras levés vers le ciel, les yeux fermés, en prière, les 5 000 fidèles de l'église protestante de Chong-yi chantent avec ferveur. Sur la scène, une chorale de 50 chanteurs vêtus de blanc et de jaune se déhanche et appelle l'assemblée à s'unir pour « l'amour de Jésus ». Le soleil printanier inonde l'immense espace blanc en s'infiltrant à travers les imposants vitraux de la verrière en forme de croix faisant office de toiture. Des caméras sur de longs bras articulés balayent l'immense église ultramoderne et diffusent sur deux écrans géants les images de la pasteure qui va prendre la parole : « Jésus est amour ! Nous avons besoin d'amour ! L'amour est roi ! » Le prêche dure une vingtaine de minutes, profond, direct, simple, concret. Dans un mandarin compréhensible dont les paroles peuvent toucher tout le monde.
Deux heures plus tard, la foule sort de Chong-yi en parlant, se serrant dans les bras, se tenant par la main. « Je viens à l'église tous les dimanches mais aussi le mardi soir pour assurer les cours de Bible dans les grandes salles derrière le bâtiment », explique avec chaleur Wei Hua, jeune infirmière de 25 ans qui attend son père, chrétien depuis dix ans et qui revient d'un long séjour de prière. Près de la petite boutique qui vend des bibles et des images pieuses, surmontée d'un « Jésus vous aime » en rouge vif, Bei Ling, une des 1 000 bénévoles de la paroisse, vous invite à rencontrer le pasteur Joseph Gu, responsable de Chong-yi : « C'est sa femme qui a assuré le prêche aujourd'hui », dit-elle avec admiration. « Il y a tant à faire et de plus en plus de monde vient voir ce que c'est que cette nouvelle église aussi grande surmontée d'une croix, les Chinois ne savent pas mais ils sont curieux », explique-t-elle en ajoutant que « chaque chrétien doit absolument amener chaque mois deux ou trois amis ou collègues pour leur faire découvrir le Christ et la Bible ». Ce qui donne près de 2 500 nouvelles personnes qui découvrent Jésus chaque année. « Mais qui ne restent pas forcément », reconnaît Bei Ling.
La ferveur est pourtant bien réelle et profonde. Les 13 classes de Bible pour enfants et pour adultes sont pleines. « Il existe une vraie renaissance de la spiritualité en Chine en ce moment, avoue le pasteur Joseph Gu, à l'aise dans un beau costume noir et sa chemise immaculée. Nous accueillons tous les curieux, les orientons. Ce sont à 70 % des femmes, avec une majorité venant de la classe moyenne urbaine. L'année dernière nous avons célébré plus de 1 800 baptêmes d'adultes ! » Face à l'admiration suscitée par l'architecture imposante de l'église, le pasteur Gu explique que « les fidèles sont très généreux, le gouvernement nous aide beaucoup notamment en nous offrant un terrain moins cher et nous recevons aussi des soutiens financiers de l'étranger (États-Unis, Europe et Asie) ». Très pris par un emploi du temps de ministre, le pasteur doit partir pour Pékin où une réunion du Conseil des chrétiens chinois (l'équivalent de l'Association patriotique des catholiques chinois, organe politique faisant le lien entre les leaders religieux et les leaders politiques) se tient ce soir.
Dans une des sept autres églises protestantes de Hangzhou, « Si Cheng », la plus ancienne de la capitale de la riche province du Zhejiang, son confrère le pasteur Zhang Yao Fa, 40 ans, accueille avec un grand sourire, une cravate bleu et jaune vif en forme de crucifix attirant tout de suite le regard. « Le nombre de chrétiens ne cesse d'augmenter depuis dix ans dans toute la Chine », confirme ce pasteur dynamique qui a déjà 15 ans d'expérience dans plusieurs églises des provinces voisines après une solide formation dans le séminaire de Hangzhou. « Il y a au moins 310 000 protestants à Hangzhou (NDLR 7 millions d'habitants) mais il n'y en avait que 270 000 il y a cinq ans.... ce qui montre que notre approche pastorale porte ses fruits : évangéliser, être témoin du Christ, servir les autres. » Une approche spécifique aux protestants par rapport à un « enseignement plus traditionnel chez nos confrères catholiques un peu loin des réalités ».
Chrétienne depuis deux générations, Yan Rong Hui, professeur au séminaire de Hangzhou, explique la nouvelle ferveur religieuse et spirituelle chinoise par la « quête d'un absolu dépassant les biens matériels. Un appartement, une voiture, des vêtements et de bons repas sont-ils suffisants pour vous satisfaire dans la vie ? De toute évidence non. Dans un nouvel univers de stress et d'insécurité sociale, il faut faire face et le christianisme vient à votre secours. » Accueillantes, chaleureuses et protectrices, les Églises protestantes séduisent par leur approche concrète et pragmatique dans un monde de compétition et de rivalité où les rapports humains ne se perçoivent plus qu'à travers l'argent. Bei Ling l'infirmière le voit bien dans sa vie professionnelle à l'hôpital : « Sans argent les malades ne sont pas soignés et renvoyés de la clinique... c'est inhumain. Il n'y a pas beaucoup d'amour dans la vie, se désole-t-elle, mais dans l'Église on trouve le bonheur. »
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