vendredi 4 juin 2010

La plus grande usine de pâte au monde va démarrer en Chine - Laurence Bollack

Les Echos, no. 20690 - Industrie, jeudi, 3 juin 2010, p. 18

Papier : les prix grimpent en flèche dans toute la filière

Les fermetures de capacités de production et la forte demande chinoise propulsent le cours de la pâte à près de 1.000 dollars la tonne. Du jamais-vu depuis plus de quinze ans. Tous les industriels de la chaîne augmentent leurs prix.

Mauvaise nouvelle pour les acheteurs de papier : dans toute la filière, les prix sont en train de grimper en flèche. A commencer par ceux, en amont, de la pâte à papier. Les cours de cette matière première, que la crise et le niveau élevé des stocks mondiaux avaient fait plonger à partir de la mi-2008, sont repartis à la hausse depuis un an de façon très spectaculaire. En quatorze mois, le cours de la tonne de pâte NBSK a pris 66 %. Avec une nouvelle hausse lancée au 1er juin par le brésilien Fibria, numéro un mondial du secteur. Il en coûtera à ses clients 30 dollars de plus la tonne, soit 950 dollars en Amérique du Nord et 920 dollars en Europe. Les prix ont ainsi dépassé leur précédent sommet du début de 2008. « Nous allons bientôt approcher les 1.000 dollars la tonne. Du jamais-vu depuis plus de quinze ans ! Avec la reprise économique en Chine, les capacités sont tendues et les papetiers non intégrés ont aujourd'hui du mal à se fournir en pâte. De plus, la baisse de l'euro renchérit les achats de pâte qui s'effectuent en dollars », explique Paul-Antoine Lacour, délégué de la Fédération des pâtes à papier.

Avec la crise économique, les grands producteurs d'Amérique du Nord et de Finlande ont fermé plusieurs usines. La faiblesse de l'activité avait aussi conduit M-Real à arrêter l'an dernier son unité d'Alizay, près de Rouen. Ce sont ces capacités qui font aujourd'hui cruellement défaut. Un phénomène amplifié par le tremblement de terre de février au Chili, qui a entraîné la fermeture temporaire de plusieurs installations. Le pays ne représente que 7 % de la production mondiale de pâte, mais en période de marché tendu, ces arrêts contribuent à aggraver les tensions.

La situation est plus contrastée en Asie, où Fibria maintient ses prix inchangés à 850 dollars la tonne. « La demande chinoise fléchit légèrement. Ils ont beaucoup acheté jusqu'en avril et depuis, illustrant une pratique générale de "stop-and-go", les acheteurs sont moins actifs », détaille Paul-Antoine Lacour.

En position de force

Au niveau mondial, les prix pourraient bien rester durablement élevés. « Les cours vont se maintenir à un haut niveau jusqu'à la fin de l'année. D'ici à cinq ans, de nouvelles capacités vont ouvrir et, à long terme, les prix vont rebaisser », anticipe Pascal Lebard, le directeur général de Sequana.

En attendant, les papetiers en aval de la chaîne augmentent à leur tour les prix pour maintenir leur rentabilité. Le sud-africain Sappi, numéro un mondial du papier glacé, a ainsi annoncé une hausse de 10 % du prix de ses produits en Europe à compter du mois de juin, après une première augmentation de 2 % au premier trimestre. « Nous pensons que ces hausses passeront sans problème. Ce sera la première fois en neuf ans que nous passons deux importantes hausses de prix consécutives », a indiqué Ralph Boettger, le patron de Sappi. De même, le suédois Billerud a augmenté ses tarifs de 5 % au premier trimestre, après un recul de 14 % en moyenne l'an dernier et a pratiqué de nouvelles hausses en avril-mai.

Après plusieurs années difficiles, les papetiers sont bel et bien en position de force. « La capacité des papetiers à passer des hausses de prix s'est renforcée, soutenue par le bond des prix de la pâte, qui pèse sur la rentabilité des industriels non intégrés, mais profite aux autres, tel UPM. Globalement, nous estimons que les prix du papier augmenteront plus vite que les coûts », prévoit Teemu Petteri Salonen, analyste chez Danske Bank.


Nouvelles capacités. La hausse des prix de la pâte et de la demande en Asie incite les industriels locaux à investir dans de nouvelles capacités. C'est le cas de Shandong Asia Pacific Ssymb Pulp and Paper, un producteur de pâte basé à Rizhao, dans la province du Shandong. Le groupe chinois va tester ce mois-ci la plus grande ligne de production de pâte du monde, dotée d'une capacité de production annuelle de 1 million de tonnes. Un projet dans lequel Shandong Asia Pacific Ssymb a investi 11,3 milliards de yuans, soit 1,35 milliard d'euros.

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