Le regretté Jean Yanne avait, au milieu des années 1970, tourné Les Chinois à Paris. Aux dernières nouvelles, aucun long-métrage intitulé Les Chinois à Göteborg n'est programmé. Il y aurait pourtant matière puisque c'est dans cette ville suédoise que se trouve le siège historique de Volvo, marque prestigieuse, propriété du groupe Ford depuis 1999, qui vient de passer sous contrôle chinois.
Après avoir vendu au fil des mois ses marques haut de gamme (Aston Martin, Jaguar et Land-Rover), le constructeur américain a cédé Volvo, en mars, au constructeur chinois Geely pour une somme quatre fois moins élevée que ce que lui avait coûté son acquisition il y a onze ans.
Scandale au royaume de Suède ? L'un des joyaux de la couronne vendu pour 1,3 milliard d'euros à des Chinois peu connus en Europe, cela fait peur à certains qui voient d'un mauvais oeil une belle marque premium livrer ses secrets à une entreprise réputée pour ses véhicules plutôt... rustiques. Mais la jolie suédoise n'a plus les moyens de faire la fine bouche : en 2009, ses ventes ont chuté à 335 000 unités et ses pertes nettes ont atteint 934 millions de dollars (762 millions d'euros).
" Volvo et Geely sont des entreprises distinctes, qui le resteront. Et Volvo va pouvoir profiter des opportunités sur le marché automobile chinois, le plus grand du monde ", s'est empressé de déclarer Li Shufu, le nouveau patron, qui prévoit de construire dans les mois qui viennent une usine Volvo dans son pays... ce qui plaît modérément à Audi, BMW et Mercedes, marques premium de plus en plus dépendantes du marché chinois.
Les chinois ont-ils eu raison de s'offrir une entreprise au passé prestigieux mais au présent difficile ? Si l'on en juge par la qualité du modèle le plus récent, la berline S60, la réponse ne peut être qu'affirmative. Cette deuxième génération - la première est née en 2000 - confirme non seulement le savoir-faire suédois en matière de sécurité active et passive, mais également l'élégance concernant le design, extérieur comme intérieur.
Les Volvo ne ressemblent plus à ces bétaillères solides mais sans charme qui ont longtemps fait la réputation de la marque. Elles sont devenues plus fluides, plus élégantes, avec notamment l'apparition du petit coupé C30, de la compacte S40 ou du XC60, véhicule de loisir très réussi.
Dans un segment premium stable, celui des Audi A4, BMW Série 3 ou Mercedes Classe C, la nouvelle Volvo a des arguments pour se faire une place au soleil : bardée d'éléments de sécurité, dont un étonnant détecteur de piétons, cette S60 au profil dynamique offre un confort de conduite remarquable. Le style intérieur, avec cette console fluide tournée vers le conducteur, ne souffre pas la critique, tout comme l'impeccable finition et le confort des sièges.
D'une longueur acceptable (4,63 m) mais d'une largeur imposante (1,87 m), ce qui peut poser des problèmes dans certains parkings, la nouvelle S60 propose pour l'instant des motorisations à la hauteur, comme le D5 diesel de 205 chevaux ou le terrible T6 essence fort de ses 306 chevaux. Aussi agréable à regarder qu'à conduire, elle perpétue le savoir-faire et le bon goût Volvo. Les Chinois de Geely, novices dans le haut de gamme automobile, ont décidément fait une très belle affaire.
Alain Constant
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