mercredi 7 juillet 2010

L'économie chinoise marque le pas... pour son plus grand bien

Le Monde - Economie, jeudi, 8 juillet 2010, p. 15

Le point de vue des chroniqueurs de l'agence économique, Reuters Breakingviews

L'économie chinoise a meilleure mine quand elle souffle un peu. Selon le centre d'études du Conseil des affaires de l'Etat, la croissance faiblit : elle devrait être de 9,5 % en moyenne sur l'année, après un premier trimestre époustouflant à 12 %, et passer à un nouveau régime de croisière de 8-9 %. Dans le cas de la Chine, un tel ralentissement est le gage d'une plus grande prospérité dans le futur.

Le nouveau chiffre peut paraître quelque peu en deçà au regard de l'historique récent du pays - 10,7 % en moyenne sur les cinq dernières années - mais il reste nettement supérieur au taux minimum de 8 % qui est nécessaire pour absorber l'afflux des migrants ruraux et préserver la stabilité sociale. Et dans le contexte mondial actuel, cela reste une performance stupéfiante.

La décélération se produira pour partie de façon presque naturelle. L'investissement dans les filières d'exportation à forte main-d'oeuvre deviendra moins rentable avec l'élévation des salaires et l'appréciation du yuan. Mais le gouvernement y met aussi du sien en essayant de juguler la folle expansion de l'encours de prêts bancaires, qui progresse de 30 %.

Le monde entier devrait s'en montrer reconnaissant. Le rééquilibrage de la balance commerciale chinoise contribuera à soutenir la croissance partout ailleurs. La montée en puissance de la consommation nationale neutralisera la volatilité des exportations, et la baisse de régime sur le crédit limitera les risques de catastrophe financière en Chine, ce qui est heureux, car une telle crise ne manquerait pas d'avoir des répercussions sur un système financier mondial déjà fragilisé.

Marges de manoeuvre

L'économie réelle s'accommodera sans peine d'un fléchissement de la croissance. En revanche, il ne sera pas aussi facile de calmer la surchauffe de la sphère financière sans faire de dégâts. Le coup de frein sur le crédit peut provoquer un enchaînement désastreux : effondrement de la valeur des actifs, chute brutale de la croissance et poussée d'inflation.

Un tel scénario a pourtant peu de chance de se produire. Si la croissance faiblit trop, le gouvernement sera sans aucun doute capable d'intervenir pour stimuler l'économie, exactement comme il l'a fait au moment de la dépression des échanges commerciaux mondiaux en 2008. Quoi qu'on en dise, la Chine est un pays encore suffisamment pauvre pour que les politiques de croissance y soient toujours efficaces. L'Etat ne manque pas non plus de marges de manoeuvre, puisque les trois quarts des richesses du pays sont placées sous son contrôle. La croissance chinoise en a probablement fini avec son allure de sprint, mais elle est bien placée pour faire un malheur dans le marathon.

Wei Gu

(Traduction de Christine Lahuec)

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Sur Breakingviews.com

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