Les autorités locales mettent les bouchées doubles pour atteindre les objectifs de réduction de la consommation d'énergie fixés par Pékin pour la période 2005-2010. Quitte à contraindre les industries à allumer leurs propres générateurs.
Au moment même où elle fustige la volonté des Etats-Unis de limiter à 4 % du PIB le déficit des comptes courants, en y voyant un « retour à l'économie planifiée », la Chine doit bien admettre que c'est sur son propre sol que se manifestent actuellement certaines aberrations inhérentes à la planification économique.
Depuis une semaine, le pays fait face à une pénurie de gazole. Dans le sud, plus de 2.000 stations-service ont fermé leurs portes, n'ayant plus une goutte à fournir à leurs clients. L'agence d'information Xinhua fait état d'une situation sans précédent et évoque des files d'attente allant jusqu'à 3 kilomètres.
Cette situation découle certes de l'augmentation de la consommation. Pour la première fois depuis les jeux Olympiques de 2008, le pays pourrait devenir importateur net de gazole ce mois-ci. Déjà deuxième consommateur de pétrole au monde, le géant asiatique connaît actuellement une croissance vigoureuse, récemment revue à la hausse par la Banque mondiale, à 10 %, ce qui accroît sa voracité pour l'or noir.
Des mesures drastiques
En septembre, la Chine a importé 5,7 millions de barils de brut, soit une hausse de 24 % par rapport à l'année précédente.
De peur d'être montrés du doigt pour n'avoir pas vu venir le problème, les grands groupes pétroliers du pays communiquent abondamment, ces jours-ci, sur les actions qu'ils mettent en oeuvre pour résoudre cette crise. Sinopec, le principal d'entre eux, a décidé de réduire de 70 % ses propres exportations, afin de donner la priorité à la demande locale.
Il n'empêche : les médias officiels admettent que cette pénurie n'aurait pas lieu si les provinces ne prenaient pas actuellement des mesures drastiques - et manifestement absurdes -pour atteindre les objectifs énergétiques fixés par le onzième plan quinquennal, qui s'achève fin 2010. Lors de la rédaction de ce plan, Pékin s'était en effet donné cinq ans pour réduire de 20 % son intensité carbone, c'est-à-dire la quantité de dioxyde de carbone émise par unité de produit intérieur brut (PIB). En 2008, à la faveur d'un net ralentissement conjoncturel, l'objectif semblait accessible. Mais la très solide reprise économique a changé la donne. Si bien que les provinces, qui sont le plus souvent très loin des problématiques environnementales de Pékin et qui privilégient encore largement la croissance économique, optent pour la méthode brutale et coupent l'électricité aux gros consommateurs d'énergie, notamment les industries. Ces dernières, pour continuer à produire, n'ont pas d'autre solution que de mettre en marche leurs propres générateurs, qui fonctionnent au gazole.
Gabriel Grésillon
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