(Paris) - Quand on parle de victimes en matière de santé, on pense aux accidents médicaux, aux erreurs de diagnostic ou aux médicaments frelatés. Mais, en Chine, les victimes peuvent aussi être les médecins. L'assassinat d'un médecin par un malade mental est un fait isolé mais significatif. Depuis la fin des années 1990, le pays tente de mener une réforme du système de santé à la lumière d'une vision libérale. Cette réforme consiste à introduire une dose de mécanisme de marché et à faciliter l'émergence des petites cliniques privées en espérant que l'Etat se débarrasse petit à petit du fardeau. Aujourd'hui, le résultat est plus que mitigé. Non seulement les cliniques privées tardent à émerger, mais la difficulté d'accès aux soins et le renchérissement des tarifs n'ont cessé de s'aggraver. Tous les maillons de la chaîne, du médecin au patient, en passant par l'industrie pharmaceutique, se plaignent d'être des victimes !
Les patients d'abord, car la libéralisation du marché pharmaceutique a augmenté leurs dépenses de santé. Les laboratoires se plaignent que les médicaments frelatés empoisonnent le marché, tandis que les médecins regrettent la baisse relative de leurs revenus. En dehors des fonctionnaires, rares sont ceux qui ont profité de cette réforme. Coupé du financement public, l'hôpital cherche des bénéfices ; les médecins surestiment leur diagnostic et prescrivent toujours plus afin de recevoir un pourcentage des laboratoires. Cette connivence est un fléau reconnu. Les médecins sont fortement haïs par les oubliés de la réforme. Au bout du compte, ils sont doublement victimes. Ils ont perdu et la garantie étatique de leur salaire et leur rang social, moralement prestigieux.
Chen Yan
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