L'ancien président américain veut réamorcer le dialogue nucléaire, alors que Nord et Sud sont à couteaux tirés depuis le bombardement de l'île de Yeonpyeong, en mer Jaune, par l'artillerie du Nord, en novembre dernier
L'homme des missions impossibles est de retour. Infatigable, Jimmy Carter reprend la route de Pyongyang avec l'espoir de réussir une percée diplomatique dans une péninsule coréenne toujours à cran. L'ancien président américain atterrit ce mardi dans la capitale nord-coréenne pour convaincre Kim Jong-il de reprendre le dialogue nucléaire et de se réconcilier avec sa rivale, la Corée du Sud. Une gageure alors que Séoul et Pyongyang sont à couteaux tirés depuis le bombardement de l'île de Yeonpyeong, en mer Jaune, par l'artillerie du Nord, en novembre dernier.
La situation dans la péninsule n'a jamais été aussi «dangereuse» depuis la guerre de Corée (1950-1953), affirme le très sérieux International Institute for Strategic Studies (IISS) de Londres. Jimmy Carter ne vient pas seul: il est accompagné de trois anciens chefs d'Etat, tous membres des «Aînés» (The Elders), ce groupe fondé par Nelson Mandela pour désamorcer les conflits dans le monde. Le finlandais Martti Ahtisaari, l'Irlandaise Mary Robinson et le Norvégien Gro Brundtland viendront prêcher la bonne parole à Pyongyang puis à Séoul où ils termineront leur périple jeudi.
Pour amadouer le dictateur nord-coréen, les Aînés plaideront pour une reprise de l'aide alimentaire internationale, comme le demande avec insistance le régime depuis le début de l'année. Pyongyang met en avant de mauvaises récoltes dues à un hiver particulièrement rude, mais Séoul soupçonne une manipulation visant à renflouer les réserves de la dictature. «La situation est horrible là-bas et nous espérons pousser les autres pays à soulager la crise alimentaire, y compris la Corée du Sud qui a stoppé tous ses envois de nourriture», a déclaré Jimmy Carter. Une pierre dans le jardin du président sud-coréen Lee Myung-bak, qui impose une ligne dure contre sa voisine du nord depuis son arrivée au pouvoir en 2008. Et qui refuse toute négociation tant que Pyongyang n'aura pas présenté ses excuses pour le bombardement de Yeonpyeong ainsi que le naufrage d'une corvette sud-coréenne, avec 46 marins à bord, en mars 2010.
L'opération Carter survient à point nommé pour appuyer les efforts diplomatiques des Etats-Unis et de la Chine, qui travaillent en coulisses à une relance des pourparlers à six sur le nucléaire, enlisés depuis 2009. Washington et Pékin redoutent que le face-à-face entre les deux Corées ne débouche sur un nouveau dérapage militaire périlleux pour la région et poussent les frères ennemis à se rapprocher. Preuve de cette coordination, l'ancien président américain et Prix Nobel de la paix s'est entretenu lundi à Pékin avec le ministre des Affaires étrangères Yang Jiechi avant de s'envoler pour Pyongyang. Et il présentera un débriefing détaillé à l'administration Obama à son retour, bien que le Département d'Etat qualifie sa visite de «strictement privée». Cette dernière permet néanmoins aux Etats Unis de tester la volonté de dialogue du régime stalinien à l'heure où ils envisagent une reprise de l'aide alimentaire à destination du Nord, mais attendent un geste tangible sur le nucléaire.
Reste à savoir si Kim Jong-il daignera rencontrer Jimmy Carter, après l'avoir snobé lors de sa dernière visite en août 2010. Cet échec ne décourage pas Carter qui se souvient avoir négocié une percée historique sur le nucléaire à Pyongyang, en 1994 avec Kim Il-sung.Séoul
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