mercredi 20 avril 2011

PSA met pleins gaz vers la Chine - Alain Guillemoles

La Croix, no. 38950 - Economie, mardi, 19 avril 2011

En multipliant les partenariats et en lançant plusieurs nouveaux modèles sur le marché chinois, le groupe automobile entend bénéficier de la croissance d'un pays qui est déjà le premier marché de véhicules au monde.

Lors d'un show millimétré, devant 500 invités européens et chinois à l'intérieur d'un pavillon éphémère, couleur argent, construit tout spécialement au pied de la plus haute tour de Shanghaï, dans le quartier d'affaires de Pudong, Citroën a dévoilé hier en première mondiale son dernier modèle haut de gamme de la série DS : la DS5. Il s'agit d'une voiture familiale grande routière, qui vient compléter les deux modèles déjà existants dans la gamme DS, les DS3 et 4. Mais surtout, en choisissant de dévoiler ce véhicule en Chine, à deux jours de l'ouverture du Salon automobile de Shanghaï, le groupe automobile PSA, propriétaire des marques Peugeot et Citroën, envoie un message clair : aujourd'hui, pour le groupe, la Chine est bien devenue le centre de la planète automobile.

La Chine, en effet, a conquis depuis trois ans le titre de premier marché automobile du monde, ayant dépassé les États-Unis en nombre de véhicules vendus chaque année. « La Chine est bien la locomotive de l'industrie automobile mondiale », constate Frédéric Banzet, directeur de la marque Citroën.

Le taux d'équipement des ménages chinois reste bas (30 voitures pour 1 000 habitants, contre plus de 500 en France) et la progression des ventes est impressionnante. En 2010, 18 millions de véhicules ont été vendus et autant produits en Chine, dont 11 millions de voitures particulières. Une augmentation de 32 % par rapport à l'année précédente. Et, depuis l'an 2000, la production a été multipliée par neuf.

D'ici à dix ans, le marché devrait être de 30 millions de voitures vendues chaque année. D'ores et déjà, les voitures vendues ne sont plus forcément les modèles low-cost produits par les dizaines de producteurs chinois coexistant sur le marché. Les voitures étrangères recherchées par les nouvelles classes moyennes chinoises sont surtout des véhicules familiaux haut de gamme, qui représentent 25 % du marché. C'est pourquoi PSA fait le choix d'être présent en Chine avec deux véhicules de luxe : la Peugeot 508 et la DS5.

Au-delà du lancement spectaculaire de la DS5, hier, c'est une stratégie ambitieuse, à la fois industrielle et commerciale, que PSA déploie en Chine. Le groupe français a conclu en juillet dernier un partenariat avec un constructeur chinois : Changan, quatrième constructeur du pays, un ancien producteur de véhicules militaires devenu spécialiste des utilitaires légers. Au sein de l'entreprise commune qu'ils ont créée à 50-50, et qui doit encore être approuvée par les autorités chinoises, PSA et Changan comptent produire, d'ici à la fin 2012, la DS5 pour le marché chinois et des véhicules utilitaires avec une capacité de 200 000 véhicules.

PSA avait déjà noué un partenariat avec un autre constructeur chinois, Dongfeng, second producteur chinois et partenaire historique, basé à Wuhan. Ensemble, PSA et Dongfeng ont produit l'an dernier 376 000 véhicules, essentiellement des Peugeot 408 et des Citroën C5. Une troisième usine est en cours de construction, qui doit produire la 508 et permettre de faire monter la production à 700 000 véhicules par an.

PSA est présent en Chine depuis 1992, avec Dongfeng. Mais il n'y a pas connu que des succès. Un partenariat conclu en 1988 avec le producteur de bus Ghangzhou avait tourné court. Depuis, le groupe a persisté. PSA a créé à Shanghaï un centre de recherche et développement qui est le plus gros du groupe hors d'Europe. Il travaille à produire des véhicules spécifiques pour le marché chinois. Il emploie 450 ingénieurs. Un membre du directoire de PSA, Grégoire Olivier, est basé de façon permanente à Shanghaï depuis un an. C'est dire si la Chine est devenue importante pour PSA.

L'an dernier, la part de marché des véhicules particuliers de Peugeot et Citroën en Chine a atteint 3,4 %. L'ambition affichée est d'arriver à 8 % d'ici à 2020, ce qui représentera un million de véhicules produits et vendus en Chine. Ainsi, PSA est mieux positionné que Renault, qui n'est présent sur le marché chinois qu'à travers son partenaire Nissan. Cependant, d'autres constructeurs étrangers sont encore mieux placés. C'est le cas de Volkswagen et de GM, qui font la course en tête. General Motors a vendu au cours du premier trimestre 2011 deux fois plus de véhicules en Chine que PSA durant toute l'année dernière.

Pour combler son retard, PSA déploie son réseau commercial en Chine et multiplie les enseignes. La gamme DS sera ainsi vendue à part, dans un réseau propre, en dehors des concessionnaires Peugeot et Citroën qui existent déjà. Mais surtout, PSA va créer, d'ici à un an, une nouvelle marque avec son partenaire Changan. Cette marque mystère n'a pas encore reçu de nom. Elle doit commercialiser en Chine des véhicules utilitaires. « Nous sommes leaders en Europe des véhicules utilitaires et Changan est leader en Chine sur ce marché. Il était logique de travailler ensemble », a expliqué hier Philippe Varin, président de PSA.

Cette marque commune pourrait aussi, dans un deuxième temps, produire des véhicules pour les particuliers. Il s'agira donc sans doute de véhicules low-cost, un segment sur lequel PSA hésite depuis plusieurs années à se lancer. Ainsi, PSA ne produira pas de véhicules à bas coût sous ses marques phares, Peugeot et Citroën, qui cherchent plutôt à monter en gamme.

« Les véhicules que nous allons développer avec Citroën seront destinés au marché chinois et aux exportations non européennes », a indiqué hier Xu Liu Ping, président de Changan, levant ainsi un peu le voile sur les intentions de PSA. Pas question, donc, pour PSA de produire en Chine un véhicule low-cost pour l'Europe. Du moins à ce jour. Car si le succès est au rendez-vous, la tentation sera grande, pour PSA, de vendre également cette voiture en France sous son nouveau nom de marque.

Le Salon de Shanghaï attire la planète auto.

Le 14e Salon automobile de Shanghaï, qui ouvre ses portes au public jeudi, devrait connaître une affluence record. Les constructeurs sont en tout cas de plus en plus nombreux à inscrire ce rendez-vous à leur calendrier. Dix-neuf nouveaux véhicules au total doivent y faire leur première apparition mondiale, preuve que ce salon est désormais pris au sérieux par les grands constructeurs. Et bien sûr la voiture électrique sera reine, comme c'est le cas partout désormais.

Au total, 2000 entreprises du secteur, constructeurs et équipementiers, venus de 20 pays, seront présents sur les 230000 m² de halls d'exposition. Quelque 1100 modèles de voitures y seront montrés. Parmi ces constructeurs, les marques chinoises aux noms encore inconnus en Europe: Chery, BYD, Geely, Faw, Saic, Changan, Dongfeng. Mais seront aussi présents les champions étrangers: VW, GM, PSA, Toyota, Nissan, Ford et Honda, et Fiat, qui sont les plus gros constructeurs a avoir pris le train de la croissance chinoise, si l'on excepte les marques de luxe, qui trouvent aussi leur clientèle en Chine.

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