mercredi 18 mars 2015

Nucléaire iranien: les chances s'amenuisent pour un accord cette semaine

Le chef de la diplomatie iranienne Mohammad Javad Zarif a minimisé mercredi les chances de parvenir cette semaine à un accord politique sur le nucléaire, malgré d'intenses tractations à Lausanne avec son homologue américain John Kerry.


Les deux ministres sont enfermés depuis dimanche dans un palace de la ville suisse, enchaînant les consultations, une course contre la montre pour trouver un compromis sur le nucléaire avant la fin du mois.

Après 12 ans de tensions internationales et 18 mois de pourparlers extrêmement denses, l'Iran et les grandes puissances du groupe 5+1 (Etats-Unis, Chine, Russie, Royaume-Uni, France, et Allemagne) se sont donné jusqu'au 31 mars pour conclure un règlement dit "politique": le texte garantirait que la République islamique n'aura jamais la bombe atomique en échange d'une levée des sanctions.

Mais après quatre jours de discussions, M. Zarif a douché les espoirs d'une percée, cette semaine, à Lausanne.

En dehors de la présence de son homologue américain, celle des chefs de diplomatie des autres pays du 5+1 "ne devrait pas être nécessaire pour cette séance" à Lausanne, a jugé le ministre iranien, cité par la télévision d'Etat de son pays.

"Car tous les ministres des Affaires étrangères des parties en négociations devraient venir lorsque des solutions auront été trouvées et que nous nous approcherons d'un accord", a-t-il argumenté lors d'une suspension de séance.

- 'Besoin d'experts, pas de ministres' -

"Nous devons trouver des solutions, a expliqué M. Zarif, pour qui "la question d'un accord vient quand nous avons mis sur le papier ces solutions et, pour les écrire, nous avons davantage besoin des experts que des ministres".

Sa rencontre avec John Kerry a duré deux heures, selon le département d'Etat, précédée d'une réunion technique entre le ministre américain de l'Energie Ernest Moniz et le chef de l'Organisation iranienne de l'énergie atomique (OIEA), Ali Akbar Salehi.

A Téhéran, la diplomatie iranienne a fait état de "bonnes avancées" sur les questions techniques.

Les deux gouvernements, qui n'ont plus de relations diplomatiques depuis 35 ans, se livrent aussi à une bataille de communication sur les chances de conclure.

La Maison Blanche a réaffirmé mardi que la probabilité de sceller un accord était "au mieux, 50/50". Une riposte à l'Iranien Salehi, mardi, selon lequel "90% des questions techniques" ont été réglés.

Depuis lundi, Américains et Européens expriment leur scepticisme quant aux chances de trouver une entente politique cette semaine. On laisse même entendre qu'une ultime session pourrait être nécessaire, après le Nouvel an iranien du 21 mars et avant le 31 mars.

"Nous avons à coup sûr fait des progrès" mais "il nous reste des sujets difficiles", avait mis en garde mardi un responsable américain.

A la suite d'une réunion lundi à Bruxelles entre M. Zarif et ses homologues européens, le Français Laurent Fabius, considéré comme le plus dur du 5+1 à l'égard de Téhéran, avait parlé d'"avancées" mais aussi de "points importants qui ne sont pas réglés".

Tous les directeurs politiques des pays du 5+1 devaient se retrouver mercredi à Lausanne, sous l'égide de l'UE.

Après un accord provisoire de novembre 2013, les grandes puissances et l'Iran ont repoussé par deux fois la date butoir pour un accord définitif. Washington a prévenu qu'il n'y aurait pas d'autre prolongation. En cas d'entente politique d'ici fin mars, les parties sont convenues de finaliser d'ici au 30 juin/1er juillet tous les détails techniques.

Le premier document de quelques feuillets fixerait les grands chapitres pour garantir le caractère pacifique des activités nucléaires iraniennes. Il établirait aussi le principe du contrôle des infrastructures de l'Iran, la durée de l'accord et le calendrier d'une levée progressive des sanctions.

Sur ce dernier point, Téhéran et les 5+1 sont en désaccord.

L'Iran voudrait une levée en une seule fois de sanctions de l'ONU, des Etats-Unis et de l'UE, qui l'étouffent économiquement et l'isolent diplomatiquement.

Il y a aussi divergence sur la durée de l'accord et sur la période d'un an, dite "breakout time", qui laisserait assez de temps au 5+1 pour réagir si l'Iran violait ses engagements. Autre point de discorde, la capacité d'enrichissement d'uranium qui serait laissée à l'Iran et donc le nombre de centrifugeuses.

Le président Obama a promis qu'il ferait tout, y compris militairement, pour empêcher l'Iran d'avoir un jour la bombe. Mais depuis 2013, il mise sur la carte diplomatique et a fait d'un rapprochement avec la puissance chiite une priorité de sa politique étrangère.

Un scénario qui met en rage Israël et une partie du Congrès contrôlé par les républicains.

Par Nicolas REVISE, avec Cyril JULIEN à Téhéran

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