En 1981, donc, à l'initiative, côté français, de Georges Frêche, alors maire PS de Montpellier, était signé le premier jumelage d'une ville française avec une ville chinoise. C'était à une période où la Chine commençait à s'ouvrir au monde occidental. L'équipe municipale de Montpellier souhaitait, pour sa part, donner à la ville une dimension internationale. On ne compte plus aujourd'hui le nombre d'échanges, d'initiatives dans tous les domaines, qui eurent lieu depuis avec Chengdu : « Ce n'est pas seulement un jumelage sur le papier, comme il en existe tant d'autres. Il y a un réel effort pour que ce jumelage ait un contenu », affirme Jacques Touchon, doyen de la faculté de médecine, et depuis peu quatrième adjoint au maire socialiste actuel, Hélène Mandroux.
Enthousiaste lorsqu'il évoque les liens avec la Chine, Jacques Touchon est un témoin actif du jumelage. C'est lui, avec la direction générale du CHU de Montpellier, qui a mis en oeuvre un protocole portant notamment sur la création d'un diplôme d'études supérieures de médecine traditionnelle chinoise à la faculté de médecine montpelliéraine. Ce protocole a été signé il y a un an à Chengdu : « Ce qui m'intéressait, dans l'approche de cette médecine, c'était une conception holistique de l'homme malade, c'est-à-dire une manière de considérer l'organe malade dans l'ensemble de l'organisme de la personne et d'envisager celle-ci dans son environnement. » À Montpellier comme ailleurs en Occident, l'hyperspécialisation en médecine a mis à mal la prise en considération globale du patient. Sans nier les avantages des pratiques occidentales, sans doute était-il temps de revenir à une certaine sagesse, et la médecine chinoise dont Chengdu est d'ailleurs un haut lieu pourrait y contribuer fortement. Le protocole prévoit qu'en échange de la création de ce diplôme qui a déjà entraîné la contribution de médecins chinois - lesquels sont récemment venus durant trois mois organiser à Montpellier une consultation de médecine chinoise - Montpellier exporte son savoir-faire sur le sida, la fécondation in vitro, la dermatologie ou la chirurgie de la main, mais aussi la gestion hospitalière.
Les Chinois, attablés aux terrasses des cafés ou que l'on croise dans les rues de cette somptueuse ville du sud de la France, sont-ils conscients du long processus d'un jumelage qui ne fut évidemment pas pour rien dans le fait de leur présence ? Pas si sûr ! Le jeune Chen Xin, 23 ans, et sa camarade de promotion, Xin Ying, 22 ans, tous deux en stage à Montpellier comme visiteurs médicaux et qui passent ici leur troisième année d'étude à la faculté de pharmacie, ne connaissent pas les raisons historiques pour lesquelles, un beau jour, ils ont entendu parler de Montpellier. Ils sont là, voilà tout, plutôt heureux d'être tombés sur une si belle cité au climat tellement agréable : « On s'est fait plein de copains français. Depuis huit mois qu'on est là, chaque semaine on est allés dans des bars, des discothèques. Ici, la vie est vraiment plus tranquille qu'en Chine, on est beaucoup moins stressés », juge Xin Ying. « Pour nous, Montpellier, c'est un peu comme un village. Là-bas, il y a beaucoup plus de monde, ça grouille, c'est très bruyant », lance Chen Xin en souriant.
Pourtant, la place de la Comédie où ils sont en train de boire un verre est l'un des espaces les plus fréquentés de Montpellier. C'est d'ailleurs là, dans un appartement qui donne sur la place, qu'habite Wang Lin, 24 ans, arrivé il y a bientôt deux ans ici, vice-président de l'Union des chercheurs et étudiants chinois. Sortant de l'école de chimie de Montpellier, il est en train de perfectionner son français à l'Université Paul-Valéry qui a signé des accords interuniversitaires avec l'Université de Sichuan. « Après, j'aimerais bien me spécialiser dans le cosmétique français », explique-t-il. Ce qui devrait le retenir en France encore quelques années, et peut-être, qui sait, pour très longtemps. Haibo Alonzo-he, 28 ans, présidente de la même association, mariée avec un Français, et qui attend un bébé pour bientôt, a choisi une intégration plus radicale, bien qu'elle s'en défende : « Je n'ai pas décidé de rester », dit-elle. Haibo est pourtant là depuis 2003, l'année où elle a rencontré son mari. Professeur de chinois, à la tête de son association, elle s'ingénie à aider ses compatriotes à s'intégrer... comme elle semble si bien l'être.
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