Après l'Allemagne, où son séjour culminera lundi prochain à l'occasion d'un meeting devant la porte de Brandebourg, le chef spirituel du Tibet se rendra pour neuf jours au Royaume-Uni. Il doit y être reçu le 23 mai par Gordon Brown, mais pas au 10 Downing Street. Contrairement à ses prédécesseurs John Major et Tony Blair, le premier ministre le verra à Lambeth Palace, la résidence londonienne de l'archevêque anglican de Canterbury. Façon de montrer que la rencontre est officielle sans trop l'être tout en l'étant.
Après un retour dans son exil indien, le dalaï-lama repartira pour l'Australie, les États-Unis et la France, où il terminera son périple le 20 août, à quatre jours de la fin des JO en Chine. Un peu comme en Allemagne, son séjour à Paris risque de donner lieu à des joutes politiques. À l'instar de ce qui s'est passé après le passage mouvementé de la flamme olympique, la décision de Bertrand Delanoë de lui accorder la citoyenneté d'honneur de la capitale et les critiques que ce geste avait engendrées de la part de la droite.
C'est l'Allemagne pourtant qui retient l'attention pour le moment. Car le casse-tête sino-tibétain s'y double d'un autre aspect, le fait que la coalition d'Angela Merkel, composée des conservateurs CDU-CSU et des sociaux-démocrates SPD, se trouve déjà en campagne électorale, un an et demi avant le scrutin. Longtemps restée peu ou prou à l'écart des considérations de nature partisane, la politique étrangère est dorénavant entrée dans le débat.
Frank-Walter Steinmeier, le chef SPD de la diplomatie, y est pour beaucoup. Depuis qu'il est devenu, l'an dernier, chef de file de son parti au sein du gouvernement hétéroclite avec le titre de vice-chancelier, il passe pour un challenger possible d'Angela Merkel aux législatives de septembre 2009. D'autant plus que le prétendant naturel à ce rôle, le président du SPD Kurt Beck, reste au plus bas dans les sondages et continue à accumuler les gaffes politiques.
« Duel à distance »
À propos du dalaï-lama, il n'y aura pas eu d'affrontement direct entre Merkel et Steinmeier. La chancelière, qui avait reçu le Tibétain il y a huit mois en suscitant l'ire de Pékin, se trouve en voyage en Amérique latine, ce dont elle doit sans doute se féliciter. Le ministre, qui s'était plaint à l'époque de devoir recoller les morceaux avec les Chinois, a refusé de le rencontrer. Du côté de la droite CDU, les dignitaires de second plan sont en rangs d'oignons pour lui serrer la main. À gauche, il a été décidé de lui faire rencontrer Heidemarie Wieczorek-Zeul, la ministre de l'Aide au développement qui ne passe pas pour un poids lourd.
Mais il y a bel et bien ce que le quotidien Handelsblatt qualifie de « duel à distance » entre Angela Merkel et Frank-Walter Steinmeier qui se trouve actuellement à Moscou, tout fier d'être le premier étranger à avoir rencontré le nouveau président Dmitri Medvedev. Que ce soit la Chine, la Russie, la Syrie ou Cuba, autant de nuances et parfois de divergences. Dans un pays traditionnellement gouverné par des coalitions, la diplomatie a toujours fait l'objet de rivalités entre la Chancellerie et les Affaires étrangères. Helmut Kohl (CDU) et Hans-Dietrich Genscher (FDP). Gerhard Schröder (SPD) face à Joschka Fischer (Verts). Mais c'étaient des relations entre « grands » et « petits » partenaires. La nouveauté, c'est que le ministre peut prétendre à la place de la chancelière.
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