lundi 26 mai 2008

Les autorités chinoises poursuivent la répression des militants tibétains - Bruno Philip

Le Monde - International, samedi, 24 mai 2008, p. 4
Fermées aux étrangers depuis le début des troubles, en mars, la Région autonome du Tibet, ainsi que les aires tibétaines rattachées aux provinces voisines continuent apparemment d'être le théâtre de manifestations sporadiques et d'une répression policière récurrente.

Le Tibetan Center for Human Rights and Democracy (TCHRD), organisation basée à Dharamsala (Inde), tient le compte, jour après jour, du nombre de protestations ou d'arrestations, sur la foi de témoignages locaux.

Selon le TCHRD, 55 nonnes bouddhistes du monastère de Pang na tashi gephelling, situé dans la préfecture autonome de Ganzi (province du Sichuan) ont été arrêtées le 14 mai. Elles protestaient contre les campagnes de « rééducation patriotique » durant lesquelles moines et nonnes doivent rituellement dénoncer le dalaï-lama et abjurer leur foi dans le chef spirituel tibétain.

Le Monde a obtenu, à Pékin, une confirmation indépendante, crédibilisant ainsi la valeur de cette information : un Tibétain originaire de Ganzi (Kardze, en tibétain) nous a indiqué avoir reçu par téléphone un témoignage de l'un de ses parents lui racontant qu' « une cinquantaine de nonnes ont été arrêtées, le 14 mai, dans la ville de Su-ngo ». Selon TCHRD, les nonnes ont organisé une marche de protestation après avoir tenu une réunion lors de laquelle elles ont proclamé : « Il vaut mieux mourir que de dénoncer, critiquer et attaquer le dalaï-lama. Si les Chinois veulent nous tuer, qu'ils nous tuent, nous ne regrettons rien. »

Toujours selon des témoins de ces événements, les nonnes se sont rendues en procession vers le siège du gouvernement local en scandant « Vive le Tibet indépendant ! Longue vie au dalaï-lama ! ». Elles ont été arrêtées peu après par les forces de sécurité.

Depuis le 15 mai, les autorités ont restreint les libertés de mouvement dans ce district situé à 300 km à l'est de l'épicentre du séisme qui a frappé le Sichuan le 12 mai. Selon notre informateur tibétain, la zone n'aurait pas été touchée par la secousse.

Le dalaï-lama, qui est arrivé, mardi 20 mai, à Londres où il devait s'entretenir, vendredi, avec le premier ministre britannique, Gordon Brown, a semblé pour sa part adopter une attitude conciliante à l'égard de la Chine. Il a demandé aux Tibétains de « ne pas troubler » le passage de la flamme olympique au Tibet. « Nous devons [la] respecter », a-t-il dit, avant d'évoquer son éventuelle venue à Pékin pour les Jeux olympiques si la prochaine réunion entre ses émissaires et des responsables chinois se passe bien. « Cela dépendra beaucoup de cette rencontre. Si [elle débouche] sur une sorte de solution à long terme [pour le Tibet], alors je serai enchanté de me rendre [à Pékin], si on m'invite », a-t-il déclaré. Quelques jours plus tôt, le gouvernement en exil du dalaï-lama avait demandé aux Tibétains de cesser provisoirement leurs manifestations au Tibet contre le gouvernement chinois, par respect pour les victimes du séisme.

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