"Lust, caution", Mardi 3 février sur Canal+ : 20h45 - 23h20
Il y a un côté Shanghai Express dans Lust, Caution, où l'héroïne arbore de magnifiques robes à fleurs moulantes chipao et se livre à des scènes érotiques sans précédent dans le cinéma chinois, jouant avec la chair et le diable. Il est essentiellement question de l'art d'une femme à simuler, faire l'actrice, dans ce film d'espionnage rétro, où la belle ténébreuse se met à chanter un air des Anges du boulevard, film mythique de Yuan Muzhi (1937).
" Désir, prudence ", suggère le titre anglais, qui sonne l'alarme, autant sur les liaisons dangereuses du sexe et de l'amour que sur celles du jeu et du réel, de l'art et de la vie. L'histoire mise en scène par Ang Lee, d'après une nouvelle d'Eileen Chang, romancière chinoise morte en 1995, est celle d'une étudiante qui, entrée dans une troupe de théâtre amateur et poussée à se faire passer pour quelqu'un d'autre à des fins politiques, succombe aux vertiges du faux-semblant.
L'histoire est authentique. Nous sommes en 1942, époque où la Chine est partiellement occupée par les Japonais. En 1939, une espionne servit ainsi d'appât pour le chef des services secrets des collabos, considéré par le parti nationaliste comme un traître, un certain Ting Mo-ts'un. Emmanuelle Péchenart, traductrice des textes d'Eileen Chang chez Robert Laffont, rappelle que les récits chinois regorgent de ce type de personnage féminin, voué par abnégation à tendre un piège à l'ennemi par le " stratagème de la beauté ".
Au-delà de sa mise en scène, Ang Lee démontre une nécessité du travestissement des sentiments et de l'identité. Signé par un homme qui se définit comme un " faux Chinois à Taïwan qui vit en étranger aux Etats-Unis ", Lust, Caution est un film sur le déni de soi.
J.-L. D.
Ang Lee (Chine - Etats-Unis, 2008, 158 min). Avec Tang Wei, Tony Leung, Joan Chen.
VIDÉO - Tang Wei dans Lust CautionCINÉMA - Lust, Caution d'Ang Lee
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