Hillary fait la leçon à Pékin - Epstein Marc
Quand la secrétaire d'Etat exhorte le géant asiatique à racheter des bons du Trésor américains... Une bonne affaire ?
Avant de quitter la Chine, dernière étape de son voyage en Asie, Hillary Clinton a accordé, le 22 février, une interview à une chaîne de télévision locale, Dragon TV : « Il est clair, a souligné la nouvelle secrétaire d'Etat américaine, que nous allons nous en sortir ou tomber ensemble. » La première et la troisième économie mondiale sont « imbriquées », a-t-elle ajouté : « Les Chinois savent que, s'ils veulent recommencer à exporter vers leur plus grand marché, c'est-à-dire les Etats-Unis, ils ont besoin que des mesures drastiques soient prises à Washington dans le cadre d'un plan de relance. » Sa conclusion est sans appel : il est dans l'intérêt de Pékin de continuer à acquérir des bons du Trésor américains. « Si vous souhaitez que nous achetions de nouveau vos jouets et vos ordinateurs, explique en substance Hillary Clinton, donnez-nous les moyens de continuer à nous endetter. »
Cet appel à l'aide des Etats-Unis plonge les dirigeants de Pékin dans l'embarras. Car leur pays est déjà le premier détenteur au monde, devant le Japon, de bons du Trésor américains : il en détenait, en décembre dernier, pour 696 milliards de dollars. Or la Chine possède aussi d'énormes réserves de change, de l'ordre de 1 950 milliards de dollars, qui en font le plus gros détenteur mondial de billets verts. L'ennui, c'est qu'il serait dans son intérêt d'investir une partie de ces fonds sur son territoire. A contrario, plus la Chine achète des bons du Trésor américains, plus elle risque de contribuer à une nouvelle dépréciation du dollar... qui affecterait ses propres réserves. A tous les jeux proposés par Washington, en somme, Pékin perd.
En période de récession mondiale, les économies reposant sur la production industrielle - l'Allemagne des années 1930, comme la Chine d'aujourd'hui - sont parmi les plus durement touchées. Car les biens manufacturés ne trouvent plus preneurs dans d'autres pays. Pas moins de 38 % du produit intérieur brut chinois est dû aux exportations.
Pour la stabilité à moyen terme de la Chine, un pays si important que son sort affecte le reste de la planète, il faut souhaiter que Pékin puisse mettre ses propres intérêts devant ceux de Washington. Les Etats-Unis, au prix de quelques efforts, trouveront toujours les moyens de régler leurs problèmes.
PHOTO - Hillary Clinton réagit à la lecture d'un article du China Daily, le 22 février 2009 / REUTERS
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