mercredi 18 mars 2009

La crise atteint les campagnes chinoises - Yann Rousseau

Les Echos, no. 20386 - International, mercredi, 18 mars 2009, p. 8

Ces dernières années, plus de 150 millions de ruraux ont rejoint les villes.

Confrontée à la dégradation de l'activité économique sur ses zones côtières qui tirent traditionnellement la croissance du pays, la Chine redoute désormais une extension du ralentissement économique à l'intérieur des campagnes du pays où vivent encore 800 millions de personnes. « La crise financière globale va rendre plus difficile la progression des revenus des fermiers », a reconnu hier Wei Chao'an, le vice-ministre de l'Agriculture. Si les revenus annuels des ménages paysans ont progressé l'an dernier de 8 %, ils sont restés, en moyenne, limités à 4.761 yuans (540 euros), très en deçà de ceux mesurés dans les grandes agglomérations (15.781 yuans ou 1.793 euros).

Pour compenser leurs faibles revenus, beaucoup de paysans profitent traditionnellement de l'envoi du salaire des membres de leur famille ayant migré dans les usines de l'est du pays, produisant des jouets, du textile ou encore du petit électronique pour les grands marchés étrangers. Ces dernières années, plus de 150 millions de ruraux avaient ainsi rejoint les villes. Mais depuis septembre dernier, plus de 20 millions d'entre eux auraient, selon les statistiques du gouvernement, perdu leur emploi et cessé leurs envois d'argent aux proches restés dans les provinces intérieures. « Cela devrait être encore plus dur en mai et juin prochains », a expliqué le responsable, qui pointe également la dégradation de l'activité dans les petites entreprises rurales travaillant à la transformation de productions locales (jus de pomme, légumes...) elles aussi vendues à l'étranger.

Baisses des revenus agricoles

Les paysans devraient aussi souffrir cette année du déclin du prix de beaucoup de produits agricoles. « Les pressions à la baisse sont très fortes », a détaillé hier Yin Chengjie, un cadre du Parlement suivant les affaires agricoles. Des récoltes records inondent un marché domestique qui, dans le même temps, souffre d'un déclin de la production des sociétés de transformation agroalimentaire. Selon le ministère de l'Agriculture, le prix du maïs aurait déjà reculé de 11,5 % depuis septembre dernier. La tonne de riz a, elle, perdu 8 %. Le soja se vend aujourd'hui 23 % moins cher qu'il y a un an.

Très inquiet des conséquences sociales de ces baisses de revenus dans une population rurale qui a déjà le sentiment d'avoir été exclue de la formidable croissance de ces dernières années, Pékin a promis hier de tout faire pour répondre au chômage des paysans migrants et à une détérioration générale du niveau de vie dans les campagnes. Le gouvernement promet d'aider financièrement les exploitations et va s'efforcer de maintenir le niveau des prix de certaines productions, en passant notamment des commandes massives pour remplir les réserves nationales.

YANN ROUSSEAU

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